Procès des faucheurs d'OGM : le résumé de l'audience

Le procès des faucheurs volontaires d'OGM s'est terminé vers 16h15 cet après-midi. Devant la cour d'appel de Poitiers, les huit prévenus -dont l'eurodéputé José Bové- ont revendiqué une nouvelle fois l'arrachage de maïs génétiquement modifié, le 15 août 2008, à Valdivienne.

Romain Mudrak

Le7.info

A l'énoncé de l'imposant casier judiciaire du plus emblématique des prévenus, José Bové, une militante dans l'assistance a soufflé, en plaisantant à son voisin : « Mon Dieu mais c'est Mesrine. » La salle d'audience était pleine d'hommes et de femmes venus soutenir les faucheurs relaxés, en juillet dernier, par le tribunal correctionnel.

José Bové a été le premier à expliquer pourquoi il avait fauché ces deux parcelles de maïs génétiquement modifiés : « Les syndicats et les associations ont déposé des recours devant la justice pour interdire l'usage de cultures OGM. Ils fonctionnent à leur rythme. Nous avons créé les faucheurs volontaires pour agir dans l'urgence, sur les risques immédiats, malgré les sanctions encourues. »

Le père du "bébé éprouvette" témoigne
Trois témoins de la défense ont ensuite pris la parole, l'un après l'autre, afin d'aborder, notamment, « le processus de contamination des champs voisins par les graines de maïs OGM ». Le biologiste Jacques Testart, père du premier « bébé-éprouvette », a souligné le manque de précaution prise dans la recherche sur les OGM : « Vingt ans de travaux ont précédé la naissance d'Amandine. Le maïs OGM est placé en plein champ, alors qu'on ne connaît pas les effets à long terme de l'introduction de certains gènes dans la plante ». Question de l'avocate du propriétaire des parcelles ravagées : « Comment auriez-vous réagi si deux cents personnes étaient entrées dans votre laboratoire pour détruire tout votre matériel ? » Réponse gênée du chercheur : « Je les aurais confrontées aux parents qui désiraient un enfant plus que tout. Aujourd'hui, personne ne manifeste dans la rue pour obtenir le droit de manger du maïs OGM. »

En pleine discussion sur l'opportunité de diffuser la vidéo témoignage de l'écrivain Stéphane Hessel, le principal défenseur des huit faucheurs volontaires d'OGM a été victime d'un ennui physique, vers 11h30. Debout face au président de la cour d'appel de Poitiers, Marie-Christine Etelin s'est démis la hanche. L'avocate a été immédiatement prise en charge par les sapeurs-pompiers de Poitiers et transportée à l'hôpital. L'audience a été suspendue jusqu'à 14h. Finalement, la vidéo ne sera pas diffusée. Stéphane Hessel n'aura pu donner son point de vue sur le sujet que dans 7 à Poitiers du 11 janvier (n°107).

Monsanto réclame 130 000€
A 14h, l'avocat de Monsanto, la firme menant les essais en plein champ, a rappelé que le Conseil d'Etat et la Cour européenne de justice avaient démontré « l'absence de dangerosité des OGM en annulant le moratoire posé par le gouvernement sur sa culture ». Avant de poursuivre : « Aucun voisin ne s'est plaint d'avoir été contaminé par des graines de maïs OGM » En vertus du préjudice matériel, il a réclamé 130 000€ d'indemnisations.

Revendiquant sa totale indépendance vis-à-vis de la Chancellerie, l'avocat général Frédéric Chevallier a affirmé que l'appel du parquet n'était pas le fruit d'un « oukase venu d'en haut ». « Quel acharnement ! », a pourtant proclamé Me Simone Brunet, qui a remplacé au pied levé sa collègue hospitalisée.

Le parquet requiert des peines de jour-amendes
Les réquisitions de l'avocat général se sont concentrées sur la destruction de la propriété d'autrui. Oui, les faucheurs volontaires ont pénétré sur un champ qui ne leur appartenait pas pour détruire le mais génétiquement modifié. « Votre combat est certainement respectable, mais les moyens ne sont pas les bons », a-t-il ajouté. Il a réclamé des peines amendes symboliques. La plus forte sanction revient à José Bové avec le paiement de deux cents jours amendes à dix euros pour José Bové. A la fin de l'audience, ce dernier a remarqué que ces réquisitions étaient moins fortes qu'en première instance, « comme si l'avocat général avait voulu minorer l'importance de ce procès commandé par le ministère de la Justice. »

L'autre défenseur des huit faucheurs, Me Nicolas Gallon, a plaidé la relaxe de ses clients en affirmant que leurs actes relevaient de « l'état de nécessité » : « Monsanto a porté atteinte à leur liberté de consommer des produits sans OGM. Ceci relève d'un intérêt supérieur au droit à la propriété privée. »

La cour rendra son arrêt le 16 février.

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