Défier l’impossible

Christophe Guyot, 56 ans. Pilote de moto, sacré champion de France Superbike et champion du monde en Endurance. Passionné de danse et de musique, il dirige sa propre écurie, GMT94, dont la base technique est installée à Neuville-de-Poitou depuis 2001.

Steve Henot

Le7.info

Nouvelle saison, nouveaux objectifs. En 2019, le GMT94 mise sur le Supersport Mondial. « Nous avons été trois fois champions du monde en Endurance (2004, 2014 et 2017, ndlr), nous avons donc décidé d’arrêter pour nous lancer en championnat du monde de vitesse », explique Christophe Guyot. Le patron de l’écurie moto était de passage à Neuville-de-Poitou, peu avant les fêtes. C’est dans la Vienne qu’il a choisi d’installer sa base technique, en 2001, pour satisfaire la demande de Michel Guerre, le premier mécanicien de son équipe. Désormais, l’atelier compte sept salariés, tous très occupés à préparer la saison qui s’ouvrira en février prochain, en Australie.

Le boss nourrit des ambitions de titre dès cette année. « C’est audacieux mais ça nous paraît réalisable. On ne lâchera pas », prévient-il avec assurance. La pression est sur les épaules des deux pilotes du team. Une exigence presque vitale pour celui qui est retraité des circuits depuis 2005. « Quand on veut aller au très haut niveau, on ne laisse rien au hasard. »

L’ancien pilote dit s’inspirer des autres sports, d’autres champions, attentif à tout ce qui amène à repousser sans cesse ses limites. La fameuse « culture de la gagne » ? Plutôt une conviction. « Je n’ai jamais eu l’idée de montrer que nous sommes les meilleurs, mais simplement de montrer que tout est possible. Je me sens perfectionniste, plus militant que compétiteur. » Car Christophe Guyot était loin de se destiner à la course.

Entreprise familiale

Longtemps, pour lui, la moto n’a été qu’une passion, simple mais déjà très présente. « J’en étais fou, je roulais vite sur le périph’… », confesse sobrement le natif de Marseille. Le virage a lieu après un cours de danse, où il fait la rencontre de Brigitte, sa future femme. « Elle était passionnée de course moto et m’a emmené sur le circuit Carole, à Tremblay. C’est à partir de là que j’ai décidé de m’engager en compétition, avec l’objectif de gagner des courses. » Alors, Christophe Guyot quitte son poste d’instituteur pour se consacrer pleinement à la compétition, dès 1989.

Arrivé sur le circuit à l’âge où beaucoup arrêtent -26 ans-, le pilote remporte très vite ses premières courses. Depuis, il s’est forgé l’un des plus beaux palmarès français de ce sport, en devenant champion de France Superbike en 1998, puis champion du monde en Endurance en 2004. Sa recette ? « J’ai beaucoup chuté, souvent compensé par l’énergie. C’était très mental me concernant. La volonté impacte la capacité à être performant. » Sa victoire aux 24 heures du Mans, en 2001, résonne encore comme un aboutissement, le sommet d’une étonnante carrière.

Aujourd’hui, Christophe Guyot n’a plus que la casquette de manager de sa propre équipe, créée en 1991. Team officiel du constructeur nippon Yamaha, l’écurie a une forte empreinte familiale. Brigitte est en charge des bénévoles et du volet administratif ; Marie, leur fille de 25 ans s’occupe ponctuellement des relations presse ; Rémi, leur fils de 22 ans officie au marketing et à la communication. Une manière de ne jamais trop s’éloigner les uns des autres, au gré d’une vie nomade aux quatre coins du globe. « Le sport de haut niveau, c’est un mode de vie d’une intensité telle que l’on ne se voit pas du tout… Il n’y a pas de week-ends. »

« Donner du rêve »

Lorsqu’il n’est pas en compétition, Christophe Guyot est sur les plateaux d’Eurosport, où il exerce ses talents de consultant depuis sa retraite sportive. « Je fais du factuel. Je ne donne pas d’opinion mais j’apporte des éléments pour que chacun se construise la sienne. » Sorte de prolongement de ses années d’enseignant, cette démarche de pédagogie lui tient à cœur. Autant que ses interventions auprès de la jeunesse en matière de prévention routière. « Sans transmission, cela ne sert à rien de faire ce que l’on fait. » Le temps manque parfois, souvent même, à ses autres passions que sont la danse et la musique. Mais les groupes de rock chers à son cœur -AC/DC, Iron Maiden entre autres- l’accompagnent partout, jusque sur ses t-shirts. Comme pour ne pas oublier ce qui le fait vibrer.

« C’est une belle vie, où il n’y a pas vraiment de pied-à-terre. Comme une drogue, ça ne s’arrête jamais », apprécie celui qui n’en reste pas moins attaché à son « 94 », son département de résidence et son numéro de pilote. Une vie de passion, au contact des autres, de bien des cultures… Et de tant de réalités, pas toujours roses, à l’arrière des circuits. « En Afrique du Sud, au Qatar ou au Mexique, on voit des situations humaines très dures… Cela nous permet de le rapporter, d’estimer le chemin qu’il nous reste à parcourir pour que l’humanité soit plus belle demain. » Résolument optimiste, Christophe Guyot veut croire que « par le sport, on peut résoudre beaucoup de questions ». A travers son parcours, il espère aussi « donner du rêve » et la force à certains talents de se révéler sur les podiums. Car il en est convaincu : « Potentiellement, tout le monde peut être champion ou provoquer quelque chose d’exceptionnel. »

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