Aujourd'hui
Une enquête nationale révèle que les internes en médecine sont particulièrement sujets à l’anxiété et à la dépres- sion. Le CHU de Poitiers n’est pas épargné.
Les deux tiers (66,2%) des internes en médecine dé- clarent souffrir d’anxiété. Un quart (27,7%) s’estiment même en état de dépression, soit trois fois plus que la moyenne nationale. C’est le constat hallucinant d’une enquête réalisée de manière anonyme auprès de 22 000 étudiants par quatre syndicats d’étudiants et de jeunes médecins (Anemf, Isnar-IMG, ISNCCA et Isni).
23% des sondés auraient même eu des idées suicidaires depuis le début de leurs études. Ces ré- sultats n’étonnent pas Antoine Julienne. Le vice-président du Syndicat des internes de Poitiers (Siaimp), affilié à l’Isni, assure que « ce malaise n’est que le symptôme d’un système de soins malade, fonctionnant en permanence à flux tendu ». Management, surcharge de travail, difficultés personnelles... Pour le praticien, ce genre de « burn out » est souvent compliqué à expliquer. Reste qu’un facteur n’arrange pas les choses : « le non-respect de la réglementation sur le temps de travail et le repos de sécurité. » A l’aide d’une calculette, Antoine Julienne additionne simplement ses heures. Les journées commencent à 7h30 et se terminent rarement avant 20h. Ce à quoi il ajoute gardes et astreintes pour aboutir à « une moyenne de base de 85h par semaine ». Si les situations varient d’une spécialité à l’autre, ce témoignage n’est pour autant pas isolé. Julie, 26 ans, in- terne en chirurgie, réalise « 60h hebdomadaires au minimum ». « Les repos de garde sont bien respectés. En revanche, pour l’astreinte, c’est moins vrai. Les chefs nous disent « Tu as dormi, alors tu restes ». Et finalement, on reste pour ne pas mettre nos co-internes dans la panade parce qu’il y a beaucoup de boulot. » La raison de ces débordements ? Le « manque d’internes lié au numerus clausus », que le Siaimp dénonce depuis plusieurs années déjà.
L'internat pour décompresser
Pour certains, cette anxiété est également imputable à la peur de mal faire. « Une erreur sur un dosage peut avoir de lourdes conséquences, affirme Hélène, 25 ans, interne en pédiatrie. Les chefs sont relativement disponibles, mais on se retrouve parfois seul. J’ai déjà eu peur de me tromper. » Pour recueillir la parole de ses collègues en souffrance, le syndicat d’internes a créé un numéro d’appel, il y a six mois. Mais les étudiants en médecine trouvent aussi refuge à l’internat. Avec sa piscine, sa salle de musculation et ses bornes d’arcade, ce lieu est pour eux un véritable « sas de décompression », comme le dit Antoine Julienne. « On a l’air d’une bande de gamins quand on décore l’internat pour une soirée, mais c’est notre façon de compenser les choses pénibles qu’on peut voir en journée », conclut Julie. Vendredi dernier, plusieurs centaines de personnes étaient invitées.
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