Bons comme du bon pain

La crise sanitaire a fait naître de jolies initiatives solidaires, notamment dans quelques-unes des boulangeries de la place. De baguettes suspendues en dons de leurs invendus, elles agrémentent à leur échelle le quotidien de personnes dans le besoin.

Claire Brugier

Le7.info

« Si j’avais connu ça quand j’étais dans la galère… » Jossia Rodriguez n’a pas hésité. Lorsque l’association Entraides citoyennes 86 a lancé l’idée de baguette, café et autres denrées alimentaires suspendus, elle a saisi l’occasion. Convaincre son patron n’a été qu’une formalité. Depuis, tout est dit sur le panneau-trépied qu’elle sort chaque matin place Charles-de-Gaulle, à Poitiers, et qui avait servi lors du premier confinement à indiquer le click and collect des commerces voisins. « Le Fournil d’Elina vous propose de suspendre une baguette, une viennoiserie, une pâtisserie, un café », y lit-on désormais. Pour le client, le principe est simplissime : acheter une denrée avec laquelle il ne repart pas et qui est mise gratuitement à la disposition d’une personne dans le besoin. Au-dessus de la vitrine, un second tableau recense les dons du jour. « Ça a super bien fonctionné dès que j’ai posé le panneau fin avril, constate Jossia. Certaines personnes sont réticentes à donner de l’argent, acheter à manger les rassure », analyse la vendeuse. Parallèlement, « les gens sont encore un peu timides pour oser venir chercher, ils préfèrent souvent me contacter sur Messenger. » Ou attendre que la jeune femme dépose les aliments « suspendus » dans le frigo solidaire installé à quelques pas, dans la cour de L’Envers du bocal.

« Notre pierre à l’édifice »

D’autres jolies initiatives solidaires ont levé dans des fournils locaux. Bénévole au Crous, Eshgi Jamalov est allé, avec le soutien de la structure, frapper aux portes de plusieurs boulangeries pour leur proposer de récupérer leurs invendus et les distribuer aux étudiants dans les cités universitaires. Il a essuyé de nombreuses fins de non-recevoir… Saïd Chnib, lui, a adhéré spontanément. Le jeune boulanger a ouvert les portes de la Boulangerie de la Gare le 2 avril 2020. « Depuis que je suis arrivé, c’est assez calme, constate-t-il, mais je veux quand même proposer tout au long de la journée la même diversité de produits, tant pis s’il en reste ! » Il s’expose ainsi à pas mal d’invendus, qu’il confie volontiers à l’étudiant. « C’est mieux que de les jeter, au moins ça fait plaisir à quelqu’un. » 


Le jeune boulanger a rejoint avec générosité un cercle de boulangeries assez restreint dont fait partie Ange (Poitiers et Chasseneuil). « Nous avons l’habitude de donner nos invendus au Secours populaire, explique Erwan Le Calvez, gérant des deux sites. Mais il a fermé pendant le premier confinement. » Ainsi ont vu le jour des partenariats avec le Crous et la Croix-Rouge. Ici, comme à la Boulangerie de la Gare, « on souhaite que le premier comme le dernier client de la journée ait le même choix de produits, avec la même fraîcheur. Chaque jour, ce sont entre 400 et 600€ d’invendus que l’on donne. »  En décembre-janvier, sa boulangerie des Couronneries avait aussi « hébergé » un restaurateur. « Beaucoup pensent qu’ils vont perdre des clients en faisant ça.  En tant que petit patron, je pense que l’on a un rôle sociétal, vis-à-vis de nos salariés comme du reste de la communauté, note Erwan Le Calvez. C’est notre pierre à l’édifice. »

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