Aidant, le saut dans l’inconnu

Mercredi a lieu la journée nationale des aidants familiaux. Marie-Hélène Rapaud a découvert cet univers en 2019, après que son mari a été diagnostiqué atteint d’une déficience fronto-temporale. Elle se livre sur son combat quotidien.

Steve Henot

Le7.info

Retour à la case départ, encore. Le placement de Robert en Ehpad s’est soldé par un échec, « violent ». Marie-Hélène doit désormais envisager une autre solution, mais laquelle ? « Il n’y a aucun établissement pour prendre en charge ce genre de malade… », déplore-t-elle. Son mari a été diagnostiqué atteint de déficience fronto-temporale en 2019 (à 70 ans), une maladie neurodégénérative apparentée à Alzheimer. Elle se manifeste par des troubles du langage, de la compréhension et du comportement. Marie-Hélène et ses enfants l’ont vue venir, sans vraiment réaliser. « Les premiers signes remontent à l’été 2017. Il a caché la pathologie sous ses problèmes auditifs : on pensait qu’il ne nous comprenait pas parce qu’il entendait mal. »


Le choc du diagnostic est double. Il faut d’abord intégrer que « vous ne retrouverez plus la personne que vous avez connue ». Puis vient très vite la question de la prise en charge au domicile, à Saint-Julien-l’Ars. « Pour nous, c’était un no man’s land », raconte Sylvain, le fils de Robert et Marie-Hélène. Les Rapaud se trouvent désemparés par des comportements qu’ils ne comprennent pas et qui monopolisent leur attention. « En fin de journée, il peut se mettre à manger n’importe quoi. Un jour, c’était un savon, évoque Marie-Hélène. La vie quotidienne devient difficile à gérer. » Robert aurait dû se rendre dans un accueil de jour trois fois par semaine, mais les confinements successifs ne l’ont pas permis. Il n’a pas pu poursuivre, non plus, ses séances d’orthophonie.


« Pas honte de dire que j’en ai marre »

Marie-Hélène supporte mal de prendre les décisions pour son mari, de devoir le placer sous un régime de protection et de représentation. De conjointe, elle est devenue aidante. Ce terme, elle se refuse à l’utiliser pour se livrer. Elle l’a découvert au cours des formations de l’association France Alzheimer, où elle recueille des conseils, des retours éclairés. « Sur ces maladies, on manque d’accompagnement, estime-t-elle. On a le sentiment de découvrir les choses par nous-mêmes. Alors que ce dont on a besoin, c’est de pouvoir être armé pour anticiper l’étape suivante. » Ces séances avec d’autres aidants sont l’occasion de libérer la parole, sans jugement. « On est traversé par un tas de sentiments contradictoires. Je n’ai pas honte de dire que j’en ai parfois marre. »


Marie-Hélène se raccroche aux quelques moments qu’elle peut encore s’accorder et aux situations cocasses que génère, parfois, la maladie. « L’autre jour, Robert a mis un de mes pantalons moulants, sourit la mère de famille. Des fois, on rigole. Il le faut ! » Sylvain, lui, savoure tous « ces moments où on le retrouve un peu ». Indispensable pour ne pas se laisser submerger par la peine et le poids des démarches. « On voit qu’il est parfois content de nous voir, de manger ou d’aller promener les chiens. »

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