Les NFT, la nouvelle bulle

Les « NFT » sont des objets de collection numériques, immatériels, qui ont vocation à être rares ou uniques. Un ancien étudiant poitevin se lance sur ce marché de plus en plus prisé, où la spéculation fait rage. Décryptage d’un phénomène émergent.

Steve Henot

Le7.info

Il a découvert cet univers lors d’un voyage d’affaires à Dubaï il y a quelques mois. Depuis, Benjamin Stehlin n’a qu’une idée en tête : percer dans les NFT. Convaincu du potentiel de ce marché, il vient de lancer Oxmose, une start-up spécialisée dans ces objets numériques certifiés (ou « jetons non fongibles » en anglais). Ici, il s’agit de modèles 3D en ultra-haute définition de quatre artistes musicaux -L’Algerino, TAYC, Lynda et RK-, réalisés en interne grâce à un dispositif de 76 appareils photo. Oxmose vient de mettre en vente 4 000 avatars que les fans peuvent acquérir en cryptomonnaie (ETH) puis consulter dans la blockchain, un espace virtuel immatériel.


Et ce n’est qu’un début. « On a un très, très gros réseau, assure l’ancien étudiant à l’IAE de Poitiers, qui planche déjà sur les prochaines « saisons ». On est notamment en contact avec des clubs de football professionnels qui sont intéressés. » Le créneau serait en effet porteur : il y a quelques semaines, une carte virtuelle de l’attaquant norvégien Erling Haaland a été vendue à 265 ETH, soit un peu plus de… 609 000€. Un record pour la start-up française Sorare, dont les vignettes de footballeurs affolent les spéculateurs.


« Le problème est 
ce que l’on en fait »

Chercheur au Fabricc de l’Université de Poitiers, Jean-Christophe Pasco s’est emparé du sujet l’été dernier. « Ce n’est pas un phénomène solitaire, note ce spécialiste en droit de la propriété intellectuelle. Il résulte d’un croisement de technologies émergentes, lesquelles convergent vers un nouveau moyen de monétisation. » Un réseau décentralisé qui se libère du contrôle des banques, assurances, etc. « Un NFT, c’est comme un contrat intelligent : 
il réduit les intermédiaires, permettant une transaction automatique et instantanée », plaide Benjamin Stehlin. Et a priori certifiée. 


« Des artistes y ont vu une opportunité de valoriser leur travail, notamment dans l’animation et la vidéo, observe Jean-Christophe Pasco. Mais comme toute nouvelle technologie, le problème est ce que l’on en fait. » L’envolée du marché des NFT n’a pas manqué d’attirer les arnaques. Certains artistes se sont par exemple fait voler leurs œuvres par des escrocs du Web. « Les systèmes liés à la blockchain ne conditionnent pas le « mint » (la création d’un NFT) à une vérification de la qualité de propriétaire ou de titulaire des droits d’auteur. » Or la valeur du titre de propriété repose sur la renommée et/ou la rareté dudit bien. Autre limite : on parle d’un marché très fluctuant, qui voit le cours des cryptomonnaies faire les montagnes russes. 
« Il y a un risque de perdre gros, comme on peut y gagner de l’argent », reconnaît Benjamin Stehlin. Selon un récent sondage de l’Ifop, plus d’un Français sur trente a déjà acheté un NFT. 


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