Réfugiés : l’accueil avec un grand A

De nombreuses familles ouvrent leurs portes aux Ukrainiens jetés sur la route par la guerre. Aux Roches Prémarie, Thierry et Chantal Desroches accueillent Olga, sa fille de 4 ans et ses parents. Leur nouvelle vie s’organise loin de Kiev. Mais pour combien de temps ?

Arnault Varanne

Le7.info

Comme tout le monde, ils regardaient la guerre à la télé. Et comme tout le monde ou presque, ils se sont « sentis concernés ». Thierry et Chantal Desroches coulent une paisible retraite à Raboué. Il y a quelques semaines, l’ancienne infirmière et l’ex-gérant de bureau de tabac se sont manifestés auprès de la mairie des Roches Prémarie, puis de l’association Coopération Poitou-Charentes Ukraine(*) pour héberger des réfugiés chez eux. Une soixantaine d’autres familles ont effectué la même démarche. « Ça pourrait être nos enfants... », 
souffle Chantal autour d’un café, le regard tourné vers Olga. La jeune femme est arrivée le 
17 mars dans la Vienne, avec sa fille de 4 ans Daryna et ses parents, Vassili et Nadia, 73 ans. « Le lendemain, on était à la préfecture pour les enregistrer, obtenir l’autorisation de séjour, les droits à la santé... », reprend Chantal.

La vie à six s’organise entre rendez-vous médicaux pour Vassili, qui souffre de problèmes cardiaques, et incursions à l’école d’Aslonnes pour Daryna. Sur les genoux de sa mère, la fillette s’amuse avec les dessins que les écoliers lui ont donnés. Il y a encore quinze jours, « elle pleurait à chaque fois que la sirène retentissait » dans l’immeuble de Kiev où la famille habite. 
« On pouvait rester deux, trois, voire quatre heures dans l’abri humide et sans électricité », témoigne Olga. Jusqu’au bout ou presque, la professeure de français a repoussé l’échéance de l’exil. Jusqu’à ce qu’un collègue lui dise « c’est le moment de partir ». Elle prend tous les jours des nouvelles de sa sœur et de son neveu, restés en première ligne. « Pour l’instant, ça va... » Jusqu’à quand ?

Difficile de se projeter

Et jusqu’à quand resteront-il sous le même toit que leurs hôtes dévoués ? Mystère. En tout cas, les « réseaux des enfants » 
Desroches (trois) ont joué à plein. Vêtements, jouets... Les réfugiés ne manquent de rien mais, en même temps, peinent à se projeter dans une nouvelle vie ici. Par exemple, Olga n’envisage pas que son père soit opéré du cœur ailleurs qu’en Ukraine. Elle avait d’ailleurs commencé à contracter un prêt, histoire de régler l’opération. Son arrivée en France rebat les cartes, forcément. Heureusement, la jeune femme parle français, a « repris des cours en visio » avec ses élèves disséminés sur le Vieux Continent. Et elle va aussi pouvoir se rapprocher de ses compatriotes, dont certains originaires de Kharkiv ont « atterri » aux Roches Prémarie.

Au total, l’association Coopération Poitou-Charentes-Ukraine a ramené trente-huit personnes de son expédition humanitaire jusqu’aux frontières polono-ukrainienne. Le bus y a déposé des dons matériels, il est reparti avec des exilés. 
« Un couple est monté dans le bus, puis en est redescendu », commente Philippe Genet, pour mieux décrire le déchirement du déracinement. A l’image d’Olga, de Daryna et de ses grands-parents, tous sont partis « une valise à la main ». « Ils se sentent redevables, confie Chantal. On les accueillera le temps qu’il faudra. Eux sont arrivés en pensant qu’ils partiraient la semaine d’après... Nous, on veut juste qu’ils soient intégrés et puissent avoir leur autonomie. »

(*)L’association accueille depuis 2001 entre 60 et 70 étudiants à Poitiers tous les étés pour des stages dans des entreprises.

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