Une égalité des droits qui ne fait plus débat

Le 23 avril 2013, l’Assemblée nationale adoptait le projet de loi ouvrant droit au mariage et à l’adoption pour les couples de même sexe. Cinq ans plus tard, cette égalité semble être entrée dans les mœurs. Illustration dans la Vienne.

Steve Henot

Le7.info

Le 6 juillet 2013, ils se sont dits oui. Ce jour-là, Bernard et Johnny -la soixantaine tous les deux- sont devenus le premier couple homosexuel marié de la Vienne, à peine deux mois après la promulgation de la loi sur le mariage pour tous. A la Bussière, petite commune (335 âmes) à l’est du département où les deux hommes vivent depuis plus de dix ans, la cérémonie n’avait surpris personne. « Une belle journée, tranquille », se rappelle Bernard, avec sobriété. Loin, finalement, des débats agités de l’époque. « Maintenant, tout le monde est passé à autre chose. »

« On a serré les dents pendant un an, à entendre des choses incroyables, horribles même, parfois de la part de nos politiques
, confie Julien, 37 ans, dont le mariage est prévu pour la fin d’année. Aujourd’hui, tout ça se tasse, devient « normal ». Plus personne n’est étonné. » Marié dès 2013, à Poitiers, Christophe (*) reconnaît que la loi du 17 mai 2013 « a achevé la normalisation, d’une manière générale ». Sans vraiment bouleverser son quotidien. « Avec mon conjoint, nous avons toujours été perçus comme un couple. » Bernard abonde, avec simplicité : « On a toujours nos chevaux, nos chiens… On a une vie normale, comme tout le monde. »

« Pourquoi n’avions-nous pas les mêmes droits ? »

Tel que l’observait la sociologue Irène Théry, il y a quelques jours, dans les colonnes du Monde, « la loi sur le mariage pour tous est allée encore plus loin en reconnaissant que la relation homosexuelle pouvait, en tant que relation de couple, s’intégrer à notre système familial et à notre conception de la parentalité. » Pour les couples de même sexe, elle incarne surtout un progrès remarquable, sur le plan social. « Cela offre une protection pour nos enfants et nous sommes parents au même titre l’un que l’autre », témoigne Christophe. Un argument « essentiel » même, dans sa décision de s’unir civilement avec son compagnon. Cinq ans plus tard, la symbolique reste forte. « On a gagné un combat, soutient Julien. Pourquoi n’avions-nous pas tous les mêmes droits alors que nous avons les mêmes devoirs ? »

Depuis 2013, plus de 170 mariages entre personnes du même sexe ont été célébrés dans le département, selon les derniers chiffres de l’Insee. A Poitiers, on se refuse à communiquer le nombre d’unions homosexuelles célébrées à l’hôtel de ville, « pour éviter tout sentiment de discrimination ». Cette attention se retrouve jusque dans les textes, adaptés dans un souci d’égalité. On parle désormais d’« époux », sans aucune distinction genrée. « Comme pour tous les couples, assure Christine Sarrazin-Baudoux, adjointe en charge de l’administration générale. C’est quelque chose qui, finalement, est passé comme une lettre à la poste. »

Mais Julien, lui, n’oublie pas que le chemin a été long pour en arriver là. « Je ne sais pas si l’on mesure bien le progrès que ça représente… C’est sans doute arrivé un peu tard, mais ce n’est pas grave aujourd’hui. »

(*) Prénom d’emprunt

Quarante-trois mariages de personnes du même sexe ont été célébrés en 2016 dans la Vienne. (DR - Fotolia)

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