Clément Guillaume, petit prince de la danse

La rédaction du 7 consacre une série aux Poitevins expatriés dont le parcours professionnel et personnel sort de l’ordinaire mais aussi aux étrangers ayant jeté l’ancre dans la Vienne. Rencontre avec Clément Guillaume, jeune danseur né à Poitiers. Après avoir dansé pendant quatre ans au sein de la Columbia Ballet School, il entend aujourd’hui poursuivre sa carrière Europe.

Claire Brugier

Le7.info

Racontez-nous votre enfance...

« J’ai eu une enfance très heureuse, aux côtés d’un père instituteur, d’une mère prof d’espagnol et de mes deux sœurs. J’ai grandi à Poitiers, à Montmidi. J’étais un enfant assez tranquille, je refusais souvent les activités que l’on me proposait, j’avais juste envie de ne rien faire. »

Petit, vous rêviez à quoi ?


« Vers 8 ans, j’ai assisté à un spectacle de l’école de danse de Mme Collas (ndlr, à Biard), auquel participait ma sœur. Ma mère avait emporté toutes sortes de jouets pour que je ne m’ennuie pas, je n’y ai pas touché. En sortant, je me suis dit : c’est ça que je veux faire, danser sur scène. J’aimais déjà jouer des personnages, me déguiser. »

Quelles étudea avez-vous faites ?

« Je suis allé au collège du Jardin des Plantes. J’ai bénéficié des horaires aménagés musique - j’ai fait sept ans de trombone au conservatoire- et danse, à l’école de Bernadette Collas. Pour un enfant qui ne voulait rien faire, j’avais un emploi du temps bien chargé ! J’aimais les deux, et surtout danser sur la musique. Après la troisième, j’ai intégré le Centre chorégraphique Christian Conte et Martine Chaumet, à Coutras. J’ai fait ma 2nde et ma 1re avec le Cned, pas ma terminale. J’avais du mal à me consacrer aux deux. Je ne peux faire qu’une chose à la fois mais je la fais à 250%. »


Votre carrière en quelques mots ?

« A Coutras, j’ai passé deux années sublimes, qui m’ont fait grandir. J’ai développé des liens très forts avec Christian Conte, qui est décédé en 2019, et Martine Chaumet. Ce sont mes parents de danse. A 16 ans, j’ai passé plusieurs auditions pour des écoles supérieures. J’ai été pris à l’école de ballet d’Amsterdam où j’ai complété pendant un an ma formation. Puis je suis parti dans une compagnie, en Caroline du Sud. Je suis resté pendant deux ans dans le corps de ballet puis je suis passé soliste la troisième année et danseur principal la quatrième. C’est ainsi que j’ai eu l’occasion de danser Albrecht, le prince dans Giselle, et le prince dans Casse-Noisette. On m’avait souvent dit qu’avec mon gabarit, plutôt petit et musclé, je ne jouerais jamais les princes. J’ai prouvé, aux autres et à moi-même, que même un prince né petit pouvait danser dans la cour des grands ! Pour des raisons sanitaires et personnelles -j’ai dû être opéré de la cheville-, je suis revenu en France en juillet dernier. Je suis actuellement à Hambourg, où je travaille à me remettre en forme avec Eric Miot. »


Un tournant dans cette carrière ?

« J’ai eu la chance de participer en 2018, à New York, à la Valentina Kozlova international ballet competition et je suis arrivé premier. Cela m’a conforté dans mon choix. Et puis, dans ce genre d’événement, on rencontre beaucoup de gens du milieu, des directeurs, des chorégraphes, de grands danseurs. On crée des liens qui peuvent éventuellement déboucher sur des opportunités. En tant qu’artiste, rien n’est jamais acquis. Les compagnies engagent par saison, ce qui peut être effrayant. »



La Vienne vous a marqué pour...

« J’ai toujours adoré revenir dans la Vienne. J’en suis parti à 14 ans mais j’ai gardé tous mes amis de l’époque. Poitiers est la ville où je me sens chez moi. J’aimerais un jour y créer une compagnie de ballet. »

Quelle est, selon vous,
a personnalité qui symbolise le plus la Vienne ?


« Peut-être Brian Joubert… Comme cadeau d’anniversaire de mes 10 ans, j’étais allé le voir patiner. »

Photo DR

REPERES

Pourquoi lui ?
Originaire de Poitiers, Clément Guillaume a quitté la Vienne très jeune pour réaliser son rêve de danse classique à Coutras, près de Bordeaux, puis dans une compagnie américaine, à Columbia. A la suite d’une blessure, il est actuellement à Hambourg mais le jeune danseur regarde déjà plus loin. Il souhaite poursuivre sa carrière en Europe, avant peut-être un jour de créer une compagnie de ballet à Poitiers, sa ville de cœur.

Votre âge ?
« 22 ans. »

Un défaut et une qualité ?
« C’est à la fois un défaut et une qualité, je suis assez perfectionniste. C’est une épée à double tranchant car cela m’incite à repousser mes limites mais cela me bloque aussi parfois au niveau artistique car je veux toujours faire mieux, je ne suis jamais satisfait. Il faut trouver le bon mélange. »

Un livre de chevet ?
« Je relis régulièrement Les Quatre Accords toltèques de Don Miguel Ruiz. C’est une façon de voir la vie. Je ne l’applique pas à 100% non plus mais cela m’aide à relativiser. »

Une devise ?
« Je n’ai pas de phrase toute faite, juste se dire qu’il ne faut pas se mettre de limites quand on veut quelque chose, pour ne pas le regretter. Quels que soient les obstacles, les blessures, les critiques, les mauvaises influences… »

Un voyage ?
« Je suis allé à Mexico pour un gala de danse, une expérience fantastique, professionnellement et humainement. Nous étions logés comme des stars dans une ville où il y a beaucoup de pauvreté. Le contraste était choquant, cela a eu l’effet d’un électrochoc, pour moi. Pour le reste, j’ai envie de danser partout, sur tous les continents ! »

Un mentor ?
« Il y en a plusieurs. Ce sont des profs qui m’ont marqué. Madame Collas évidemment, car elle m’a donné la passion de la danse. Le danseur et chorégraphe Guillaume Bordier, qui m’a pris sous son aile quand j’avais 13-14 ans et qui m’a convaincu de me lancer dans la danse à pieds joints. Monsieur Conte, évidemment. Il m’a beaucoup apporté. A un stade un peu plus professionnel, il m’a fait confiance. Il y avait une grande complicité entre nous et je regrette de ne pas avoir passé plus de temps avec lui. C’est l’une des plus belles rencontres de ma vie.  Et enfin je veux citer Eric Miot, avec qui je travaille aujourd’hui, qui est extraordinaire dans la vie professionnelle et dans la vie en général. »

Un péché mignon ?
« Sûrement la gourmandise. Mais il faut savoir se faire plaisir pour ne pas être frustré. »

 

 

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