Nos plus vieux ancêtres ont <br>2,1 milliards d’années</br>

A l’heure de la réforme du lycée, le programme scolaire de Science et Vie de la Terre (SVT) va devoir s’adapter à cette révolution. Des chercheurs de l’université de Poitiers viennent de bouleverser toutes les théories sur l’apparition de la vie sur Terre. Selon eux, les premiers organismes complexes dateraient de 2,1 milliards d’années.

Romain Mudrak

Le7.info

Jusqu’à présent, seules des bactéries unicellulaires avaient été détectées à cette période de l’histoire (appelée Protérozoïque) beaucoup moins pourvue en oxygène. La création d’organismes composés d’une multitude de cellules possédant un noyau, une membrane et un ADN, remontait à 600 millions d’années environ. Voilà pourquoi la découverte de l’équipe d’Abderrazak El Albani (laboratoire « Hydrogéologie, argiles, sols et altérations » - Unité mixte CNRS/Université de Poitiers) bouleverse pas mal de dogmes. Ces travaux recevront dès demain, 1er juillet, les honneurs de la revue « Nature »… en Une.

250 spécimens collectés

Au cours de l’année 2008, les chercheurs poitevins ont ramené plus de 250 fossiles provenant d’une carrière de Franceville au Gabon. « Ce site était exploité depuis une dizaine d’années pour sa roche et ses gisements d’uranium naturels. Des géologues, universitaires et employés par de grands groupes privés, avaient précisément daté chaque couche de sédiments. Nos recherches ont confirmé ces données. Nous n’avons aucun doute sur la datation des fossiles », affirme Abderrazak El Albani. Si personne ne les a vus, c’est qu’il était impossible, en théorie, de trouver ce genre d’organismes dans un site aussi ancien.

Les chercheurs ont utilisé une sonde ionique afin de confirmer la présence de matière organique pluricellulaire dans ce fossile recouvert de pyrite (un minéral formé de disulfure de fer). En étudiant les structures sédimentaires de ce site remarquable par sa qualité de conservation, les scientifiques ont révélé que ces organismes vivaient en colonie d’une quarantaine d’individus, dans un environnement marin, autour de 30 mètres de profondeur.

« La vie n’est pas linéaire »

Ces corps mous de 10 à 12 cm ont bénéficié d’une augmentation du niveau d’oxygène pour proliférer il y a 2,1 milliards d’années. Ils auraient apparemment disparu 200 millions d’années plus tard au moment d’une chute brutale du taux d’oxygène dans l’atmosphère. « Philosophiquement, cette découverte est aussi intéressante car elle démontre que l’évolution de la vie n’est pas linéaire. Des organismes ont pu renaître après des catastrophes », souligne Alain Meunier, professeur de géologie et membre de l’équipe poitevine.

Un scanner tridimentionnel (aussi appelé microtomographe X) a mis en évidence la présence de sortes de nageoires en périphérie de ces corps. Aidée du scientifique suédois Stephan Bengtson, l’équipe poitevine s’attachera dans les prochains mois à comprendre à quoi elles servent.

En parallèle, Abderrazak El Albani sollicitera l’aide du laboratoire Signal, Image et Communication (situé sur la Technopole du Futuroscope) pour modéliser en trois dimensions l’apparence de cet organisme forcément abîmé par le temps.

crédits photo :

photo 4 : © CNRS Photothèque / Kaksonen

photo 5 : © CNRS Photothèque/F. Ossa Ossa

photo 6 : © CNRS Photothèque / A. El Albani & A. Mazurier

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