Le « calvaire » des étudiants étrangers

Pendant le confinement, plusieurs centaines d’étudiants étrangers ont été contraints de rester à Poitiers dans des conditions souvent précaires. Leur priorité aujourd’hui ? Retrouver un job et valider leur année afin de conserver leur titre de séjour.

Romain Mudrak

Le7.info

Le 12 mai dernier, Papa Oumar Ndiaye a publié un article sur le site The Conversation intitulé « Le calvaire des étudiants africains confinés en France ». Doctorant en sociologie à Poitiers, originaire du Sénégal, il voulait exprimer un « coup de gueule » après avoir reçu un email qui l’a scandalisé. « Pendant le confinement, un étudiant africain de la cité universitaire Marie-Curie comme moi me disait qu’il n’avait pas mangé depuis trois jours. Je me suis mis à pleurer. » Quand l’université a fermé ses portes le 13 mars, la quasi-totalité des étudiants français ont rejoint leur famille. Mais environ 500 de leurs camarades internationaux n’ont pas pu quitter leur résidence. Les frontières se sont rapidement fermées et, surtout, les prix des billets d’avion du jour pour le lendemain ont flambé. Leur pays d’origine ne les a pas aidés. 30 à 40% d’entre eux ont continué à percevoir une bourse de 300 à 600€. Des aides d’urgences ont été débloquées (lire ci-dessous).

L’été de tous les dangers

« Evidemment, tous ont perdu leur petit boulot qui leur permettait d’être autonomes vis- à-vis de leur famille », ajoute le pensionnaire du laboratoire Gresco, spécialiste des migrations internationales. Le collectif Entr’action, initié par des associations communautaires, s’est rapidement organisé pour mettre en place une distribution alimentaire de première nécessité, avant que le Crous ne prenne le relais.

La situation ne s’est pas améliorée avec le déconfinement. Désormais, plusieurs questions se posent. D’abord, ces étudiants parviendront-ils à retrouver un job cet été, qui leur permettrait de vivre jusqu’à la fin de l’année ? L’agriculture et la restauration, d’habitude pourvoyeuses d’emplois, recruteront certainement moins en 2020. En outre, la préfecture appliquera-t-elle à la lettre les critères de renouvellement de leur titre de séjour ? « Il faut avoir validé son année et justifier de revenus suffisants. Pas simple cette fois. On verra quel traitement ils recevront », insiste Saturnin Abgofoun, qui accueille chaque année les étudiants étrangers avec l’association Maeva. Quant aux animations de l’été sur le campus, elles restent à définir.

« Plus de 500 000€ d’aides versées »

Le Crous de Poitiers a joué un rôle central dans le soutien aux étudiants pendant et après le confinement. Mais quelques décisions ont suscité l’incompréhension. Sa directrice, Marianning Hall précise les choses.

Quel a été le rôle du Crous pendant le confinement ?
« Plus de 500 000€ d’aides sociales ont été versées aux étudiants nationaux et internationaux. Le nombre de bénéficiaires a presque quintuplé par rapport à l’an passé. Autant dire que les assistantes sociales n’ont pas pris de vacances. Avec le service de santé universitaire, on a fait du porte-à-porte pour diffuser des messages de prévention face au virus. D’autre part, des tuteurs étudiants, payés par le Crous, appellent encore aujourd’hui plusieurs fois par semaine les résidents afin de s’assurer qu’ils vont bien. »

Au début du confinement, les résidents n’ont reçu que du pain et des pommes. C’est peu...
« Nous avons distribué gratuitement des pommes, du pain et des pommes de terre. Tout cela est venu compléter les aides financières qui étaient aussi indirectement des aides alimentaires. Une distribution alimentaire est maintenant organisée tous les jeudis à 15h à la cité Descartes. On propose aussi désormais une restauration avec une carte diversifiée en vente à emporter à Rabelais et en ville. »

Les étudiants internationaux ont dû payer leur loyer tandis que d’autres ont été exonérés. Comment l’expliquer ?
« Je comprends la réaction des étudiants internationaux mais si on raisonne d’un point de vue global, le Crous loge un étudiant sur dix. Les autres, hébergés dans le parc social ou privé, ont payé leur loyer. La décision nationale a été d’exonérer les étudiants qui ont quitté temporairement leur logement, mais pas ceux qui sont restés. Nous avons proposé des services en contrepartie. »

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