Attentat de Conflans : l’onde de choc dans la Vienne

Plusieurs rassemblements ont eu lieu dimanche et lundi pour rendre hommage à Samuel Paty, assassiné à Conflans-Sainte-Honorine pour avoir montré en classe des caricatures du prophète Mahomet. Jules Aimé, professeur d’histoire-géographie à Poitiers, témoigne.

Steve Henot

Le7.info

Quatre jours après l’assassinat de Samuel Paty, un collègue enseignant de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), Jules Aimé se dit toujours
 « sidéré ». « Mais pas si étonné, s’empresse-t-il de préciser. C’est triste à dire mais, un jour ou l’autre, un enseignant devait payer un tel tribut. » Reste que le professeur d’histoire-géographie du collège France-Bloch-Sérazin, à Poitiers, n’imaginait pas ce scénario, une telle barbarie… « Heureusement qu’il y a les vacances scolaires, car beaucoup de collègues ne seraient pas en état de reprendre. Nous sommes très touchés. Ce qui a été visé, ce n’est pas seulement la liberté d’expression, c’est l’enseignant. »

Il était du rassemblement de lundi, sur le parvis de la mairie de Poitiers, parmi collègues, élèves et parents d’élèves. La veille, 1 500 personnes avaient déjà rendu hommage à Samuel Paty au pied du lycée Victor-Hugo. D’autres rassemblements ont également eu lieu à Buxerolles, Châtellerault… Dans la Vienne, c’est l’onde de choc. Le drame de Conflans-Sainte-Honorine est venu raviver le douloureux souvenir des attentats de Charlie Hebdo. Dans la foule, les panneaux avec l’inscription « Je suis Samuel » font aujourd’hui écho au célèbre « Je suis Charlie » de 2015. Tout un symbole.

« On est en première ligne »

Devant l’émotion suscitée dans le département, le rectorat veut avant tout « rassurer ».
 Et rappelle qu’une cellule
 « Valeurs de la République », composée d’un proviseur vie scolaire, de référents laïcité et citoyenneté, de juristes, est mise à la disposition des personnels pour signaler, anonymement, tout acte à caractère raciste ou antisémite. En cas de suspicion de radicalisation d’un élève, le rectorat doit faire un signalement auprès de la préfecture. « L’académie est très, très peu concernée par ces faits », précise le service communication.

Dans ce qui a été dit par le procureur de la République des Yvelines des enseignements de Samuel Paty, Jules Aimé a retrouvé « sensiblement la même manière » qu’il utilise pour amener le sujet de la liberté d’expression en classe « de manière progressive ». « Mais avec moins de précautions que lui. » D’où une certaine indignation quant au manque de soutien dont aurait souffert l’enseignant assassiné. « On est en vase clos dans nos salles, bien seuls face à ce genre de situation. Et la hiérarchie est bien souvent démunie. »

Jules Aimé confie avoir déjà été confronté à des « questionnements d’élèves », sans que cela n’aille plus loin. « On est en première ligne face à ce genre d’intégrisme, explique-t-il. Nous ne sommes pas si nombreux à inculquer les valeurs de la République. Je rejoins l’idée que nous sommes des soldats, comme les hussards noirs sous la IIIe République. » L’enseignant assure préparer la rentrée sans plus de crainte. Même si rien ne sera plus comme avant. « Je ne pourrai plus aborder le sujet sans penser à Samuel Paty. Je pense apporter quelque chose en classe à sa mémoire, on a besoin de ce symbole. »

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