« Les architectes sont des passionnés »

Vice-président du Conseil régional de l’Ordre des architectes, Benoît Engel estime à moyen terme que la crise sanitaire va entraîner « une remise en cause de la manière d’habiter, de se déplacer et de travailler ». En attendant, le professionnel niortais et ses confrères serrent les dents.

Arnault Varanne

Le7.info

Benoît Engel, dans quelle situation économique les architectes ont-ils terminé 2020 ?
« Ça pourrait aller mieux, sachant que 2020 n’avait pas très bien démarré. On sait que les années d’élection sont toujours particulières. Il faut voir que les architectes interviennent toujours avec un peu de retard par rapport à l’actualité. Un projet qui se décide à l’instant T nécessite parfois plusieurs mois voire plusieurs années avant d’arriver à la phase d’étude architecturale. »

Concrètement, quelles conséquences le premier confinement a-t-il engendré ?
« Nous avons pu faire face à la première crise sanitaire, même si l’activité n’a pas été extraordinaire. 60 à 70% des études et des chantiers se sont arrêtés. Un autre phénomène aggravant nous a pénalisés : la suspension des instructions d’autorisation d’urbanisme. Heureusement, les préfectures ont été compréhensives et ont débloqué les situations. »

Selon une étude menée par l’Ordre des architectes, 30% des cabinets n’auraient plus de trésorerie...
« Effectivement, ces chiffres sont aussi valables en Nouvelle-Aquitaine. On estime à 30% la baisse du chiffre d’affaires pour 2020 et 2021, surtout pour les libéraux qui sont plus touchés que les autres. On sait aussi que 61% des cabinets disposent d’une trésorerie inférieure à trois mois. Maintenant, il n’y a eu qu’une seule radiation d’agence auprès de l’Ordre l’année dernière. Architecte, c’est un métier de passionné, on n’exerce pas pour gagner de l’argent. Et beaucoup d’entre nous travaillent seuls. Les gens savent courber l’échine. »

« Si la crise sanitaire a une conséquence positive... »

La transition écologique pèse fortement sur les projets. en quoi la crise sanitaire peut-elle réorienter les projets sur lesquels vous travaillez, bâtiments publics ou habitat individuel ?
« Les contraintes liées à la transition énergétique sont de plus en plus fortes, ce qui se traduit pour nous par des formations supplémentaires. Nous sommes des spécialistes du cadre et des conditions de vie des gens. Nous espérons donc que les maîtres d’ouvrage vont prendre en considération la question de l’habitat. »

Comment cela peut-il 
se traduire ?
« Nous devons réfléchir sur les surfaces, des espaces plus partagés pour « habiter ensemble ». La limite entre les espaces publics et privés peut être revue. L’entraide et la solidarité entre des habitants d’un même territoire ne passe plus par le modèle de la maison individuelle sur un terrain entouré de troènes. Le télétravail entraîne par ailleurs une réflexion dans les entreprises. Si la crise sanitaire a une conséquence positive, c’est celle-ci. Elle accélère la remise en cause de la manière d’habiter, de se déplacer et de travailler. »

DR Benoit Bost

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