Recherche - Ivre comme une abeille

Depuis un an, Victor Desclos le Peley mène une thèse à Poitiers sur l’impact de certains pesticides sur le comportement et le développement des abeilles. Signe particulier : il suit les spécimens tout au long de leur vie, soit environ trente-cinq jours.

Romain Mudrak

Le7.info

« Si elles venaient à disparaître, nous n’aurions plus que quatre ans à vivre. » C’est sur cette phrase mystérieuse que Victor Desclos le Peley a débuté sa prestation lors de la finale Nord-Aquitaine du concours Ma Thèse en 180 secondes (lien sur Le7.info). De qui parlait-il ? Des abeilles qui jouent un rôle si important pour la reproduction des végétaux et notre alimentation à travers la pollinisation. Doctorant au sein de l’équipe Ecologie et biologie des interactions (EBI) de l’université de Poitiers, il a entamé en février 2021 un travail de recherche consacré à l’impact de certains pesticides sur le comportement des abeilles. Une question cruciale à la hauteur de la polémique créée par la réintroduction des néonicotinoïdes dans les cultures de betteraves. En réalité, si les abeilles ne meurent pas directement au contact de cette molécule, d’autres effets tout aussi problématiques apparaissent. Elles ne parviennent plus à s’orienter correctement ou à communiquer. Un peu comme les humains quand ils consomment trop d’alcool.

Une puce sur le dos

L’impact néfaste des néonicotinoïdes est désormais bien connu. Victor Desclos le Peley va donc s’intéresser à des molécules moins étudiées mais répandues pour évaluer précisément leurs effets « non mortels ». Pour cela, il va suivre les abeilles sur le long terme. 
« Dans un premier temps, je vais élever des larves en ajoutant à leur alimentation une dose de pesticide correspondant à ce qu’elles pourraient rencontrer dans leur environnement, explique le doctorant. Une façon d’observer leur développement. « Ensuite, j’équipe les jeunes abeilles d’une puce RFID qui fonctionne comme un badge d’entreprise afin de suivre leurs entrées et leurs sorties de la ruche. » L’été dernier, le chercheur a doté plus de 3 500 abeilles d’une sorte de petit sac à dos très élégant. Tout cela sur le site du Magneraud, dans les Deux-Sèvres, propriété de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae). Evidemment, cette exposition volontaire aux pesticides pose un problème éthique. Mais c’est le prix à payer pour faire la lumière sur les effets délétères de ces produits. La thèse de Victor est financée dans le cadre du plan gouvernemental Ecophyto visant à réduire l’utilisation des produits phytosanitaires. Malheureusement, entre l’artificialisation des terres, les maladies et le frelon asiatique, la survie de l’abeille est loin d’être assurée… et la nôtre avec.

Un jeu pour mieux connaître les abeilles
Connaissez-vous Be happy bees ? L’association Un monde pour tous a créé ce jeu de cartes en collaboration avec Freddie-Jeanne Richard, maître de conférences à l’université de Poitiers, pour aborder de façon interactive la vie des « abeilles à miel » et ce qui les menace. Le but ? Collecter des réserves avant l’arrivée de l’hiver et déjouer les attaques… Ce jeu est destiné aux familles et aux écoles dès le primaire. Info : umpt.biodiversite@yahoo.com ou à la maison du tourisme.

À lire aussi ...