L’accueil des réfugiés vu par
 un chercheur en exil

Au terme d’un long périple, Nasir Ahmad Nusrati est arrivé en décembre à Poitiers avec sa famille. Accueilli dans le cadre d’un programme de protection des scientifiques, ce chercheur exilé afghan va réaliser une thèse sur le droit des réfugiés.

Romain Mudrak

Le7.info

Ce fut sa première question en arrivant à Poitiers, le 21 décembre 2021. Où est la bibliothèque ? Nasir Ahmad Nusrati est une référence dans son pays, l’Afghanistan. Ce chercheur en droit et sciences politiques dispose d’une solide expérience d’enseignement à l’université de Kandahar et compte une dizaine de publications scientifiques à son actif. A seulement 29 ans, il a même été nommé doyen de sa faculté et porté les travaux d’un centre de recherche créé avec l’Inde voisine. Mais tout s’est arrêté d’un coup, l’été dernier, avec le retour des Talibans au pouvoir.

« Mon université a très vite fermé, il est devenu difficile de travailler en Afghanistan, explique-t-il dans un français bien maîtrisé que l’intéressé a appris en licence à partir de 2014. Impossible de parler avec les médias. Beaucoup de restrictions sont apparues pour les femmes. Les droits fondamentaux n’étaient plus assurés. » Avec sa compagne et sa petite fille alors âgée de 4 mois, ils sont partis. Direction l’Iran d’abord, avec la quête de médicaments comme prétexte. Après plusieurs étapes, la petite famille est parvenue à rejoindre Istanbul puis Paris en avion. Au total, leur voyage a duré près d’un mois. Comme les Ukrainiens qui fuient actuellement les bombes russes, Nasir et les siens ont quitté leur appartement avec le strict minimum, contenu dans trois valises.

Une solution durable pour les réfugiés

Ce chercheur émérite est reçu en France dans le cadre du Programme d’aide à l’accueil en urgence des scientifiques en exil (Pause), initié par l’Etat français en janvier 2017. Son profil a séduit les représentants de l’université de Poitiers, engagée dans cette coopération depuis ses origines (lire ci-contre). 
« Nous sommes nombreux à travailler sur les migrations internationales dans notre laboratoire. Et en droit, il est obligatoire de savoir parler français », précise Florian Aumond, maître de conférences à la faculté de droit et sciences sociales. Avec son collègue Philippe Lagrange, il dirige la thèse que Nasir Ahmad Nusrati réalisera le temps de sa présence en France au sein du laboratoire Cecoji. Le thème ? 
Les « solutions durables » à la situation des réfugiés, avec pour cas pratique les réfugiés afghans. Le programme Pause finance 60% de son salaire de doctorant pendant trois ans, l’université prend en charge le solde ainsi que les premiers loyers pour son appartement poitevin. A travers ses travaux, Nasir veut être utile. Une façon de rendre ce qu’on lui a donné.

À lire aussi ...