L’automédication étudiée par des économistes

La faculté de sciences économiques de l’université de Poitiers s’intéresse de près à la santé. La preuve avec la prochaine publication dans une revue spécialisée d’une étude sur les Français et l’automédication.

Arnault Varanne

Le7.info

Economie et santé. Deux termes qui s’opposent souvent, sur fond de manque de moyens dans l’hôpital public et de pénurie de personnels. Et pourtant, le récent Forum Innovation santé, au palais des congrès du Futuroscope (cf. Le 7 n°578) et le lancement, à la rentrée, d’un master d’économie appliquée sur l’évaluation des politiques d’éducation, d’emploi et de santé vont dans le sens d’une meilleure interconnexion entre les deux disciplines. Tout comme la gestation d’un diplôme universitaire « dédié aux professionnels de santé et des études avec le CHU de Poitiers », 
dixit Liliane Bonnal.

Par-delà les formations, la directrice de l’UFR et Xavier Moinier, maître de conférences en sciences de gestion, viennent de dévoiler les résultats de leur étude commune sur l’automédication, réalisée à partir de fin 2019 auprès de 1 034 personnes. « A l’origine, ce qui nous intéressait, c’était d’étudier le comportement des patients en officine, ajoute Xavier Moinier. 70 à 80% du chiffre d’affaires d’une pharmacie est lié à la vente de médicaments, le reste concerne certains dispositifs paramédicaux et l’automédication (5,8%). Cette part va grossir puisque certains médicaments seront en accès libre. On questionne aussi le modèle économique : rémunère-t-on les pharmaciens au nombre de boîtes ? Ou à l’acte officinal ? »

Vers un pharmacien référent ?

L’étude des deux économistes, qui sera bientôt publiée dans la revue Management international, met en évidence trois types de consommateurs : les émancipés, les attentistes et les dilettantes. Les premiers sont « ceux qui se prennent en charge, veulent être acteurs et autonomes par rapport à l’expertise médicale » et pourraient, à terme, « adhérer à une démarche d’éducation thérapeutique, de prévention ». 
Les deuxièmes sont « prudents et opportunistes » et ne demandent qu’à recevoir davantage de conseils d’un professionnel. Enfin, les dilettantes « ont une connaissance minime de leur santé » et vont d’une officine à l’autre dans l’urgence. Le concept de pharmacien référent, qui existe en Belgique, est « intéressant à travailler » selon les deux universitaires. D’autant que l’automédication est « la première cause de décès ».

Dans un contexte de désertification médicale et d’explosion des dépenses, la réflexion sur les différents maillons de la chaîne de valeur de soins est évidemment pertinente. Plus on responsabilise les patients, plus ils se sentent en capacité d’être acteurs de leur santé, donc davantage dans une démarche de prévention. De la coupe aux lèvres...

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