Samuel Tixier-Célérault, de l'art de l'audace

Samuel Tixier-Célérault, 47 ans. Nouveau patron du restaurant Del Arte à Chasseneuil-du-Poitou. Businessman ambitieux. Après avoir fait fructifier de grandes enseignes de « retail » en France et en Asie, ce Deux-Sévrien a voulu travailler pour lui et chez lui. Signe particulier : n’a pas vendu son âme au diable.

Romain Mudrak

Le7.info

Il ne voulait pas rater ce moment. Quitte à bouleverser son agenda. Mardi dernier, Samuel Tixier-Célérault était à l’ouverture de l’enseigne Chez les fermiers, le nouveau magasin de producteurs, lancé par son 
« ami d’enfance » Gary Daguisé, aussi connu pour ses biscuits Les p’tits amoureux. Tous les deux ont grandi à Faye-sur-Ardin, une petite commune rurale de 
400 âmes un peu au-dessus de Niort dans les Deux-Sèvres. « On est toujours resté en contact, on a même failli reprendre une entreprise ensemble. » Quarante ans plus tard, ils sont quasiment voisins à nouveau ! Tandis que l’un a conclu un pacte avec des agriculteurs du territoire pour vendre leurs produits à Poitiers-Nord, Samuel a repris le restaurant Del Arte de Chasseneuil-du-Poitou après avoir pas mal bourlingué.


« On a un autre point commun, c’est l’audace », confie Samuel. Elle a marqué son parcours d’une empreinte indélébile. Cheveux fous, chemise blanche sous une veste de costard sombre, l’entrepreneur n’aime pas perdre son temps. Il parle vite, décide vite même s’il assure prendre le temps d’écouter. « Pour moi la différence alimente le débat. D’une manière générale, je suis très ouvert à la contradiction, je peux changer d’avis mais il faut me convaincre avec de vrais arguments. » 


Une progression fulgurante

Sans surprise, sa carrière est marquée par une progression fulgurante. Diplômé de l’IUT de Châtellerault en techniques de commercialisation, il poursuit sur une licence à Lille mais n’a pas l’occasion de la terminer. Il est recruté dans l’ex-Printemps à Poitiers à la fin d’un stage. Son potentiel est vite identifié. Pendant dix ans, s’enchaînent des expériences à la Fnac, la Camif, pour le plus grand plaisir de ses parents qui y ont travaillé tous les deux, puis chez Promod. Sur des postes de plus en plus haut placés. Le jeune homme dynamique et ambitieux impose son style et affiche de bons résultats. En 2008, le distributeur d’articles de mode féminins lui confie l’extension de toute la zone Asie. Samuel n’a que 
32 ans. « Depuis toujours, j’avais envie d’un spectacle visuel et culturel en me levant le matin. » 
Là-bas, il est servi !


Finalement après plus de cinq ans de cette vie d’expatrié, il revient en France. Seul. Sa compagne de l’époque ne le suit pas. Samuel n’est pas du genre à se morfondre. Cet amateur de grands espaces et de Harley-Davidson part aux Etats-Unis pour sillonner la célèbre route 66. A son rythme pour une fois. « J’ai pris le temps de rencontrer des gens qui sont restés des amis, et d’en prendre plein les yeux. » 
A son retour en novembre 2015, son CV impressionne le directeur général du Printemps qui le nomme cette fois à la tête du magasin de Vélizy, deuxième plus gros de France avec un chiffre d’affaires de 60M€. L’apothéose.


Et puis en 2020… tout s’arrête. Covid oblige, les centres commerciaux baissent le rideau. Samuel en profite pour valider un master à l’ESCP. On appelle cela une validation des acquis de l’expérience (VAE). Seize mois d’introspection durant lesquels il prend du recul sur sa carrière, sa vie et ses envies. La réflexion ne s’arrête pas là. Direction Saint-Jacques-de-Compostelle, 2 400km à pied en trois mois. « Je ne savais pas où j’allais dormir. Je n’avais rien organisé, rien anticipé contrairement à ce que j’ai toujours fait dans mon travail. Ma seule priorité était d’avancer. Impossible pour moi de renoncer. » Une parenthèse intégralement focalisée sur le présent. « J’ai pris conscience du temps qui passe pour moi, pour les autres. Le chemin amène des interrogations. J’avais toujours envie d’entreprendre, mais chez moi, près de ma famille. » Autrement dit dans le Poitou. Comme une envie, à 40 ans passés, de rattraper le temps perdu loin des siens et les anniversaires manqués. De retrouver ses racines et de fonder une famille. Il rachète une ancienne école à Poitiers, de vieilles pierres chargées d’histoires.


Retour aux sources

Quelques mois plus tôt, au cours d’une soirée conviviale organisée par le restaurant Del Arte situé à l’intérieur du centre commercial de Vélizy, Samuel avait bien sympathisé avec le directeur général de l’enseigne. « Il m’avait dit 'On a quelque chose à faire ensemble'. Je suis de ceux qui pensent qu’il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rendez-vous. » A l’été 2022, la franchise de Chasseneuil-du-Poitou est à vendre. C’est un signe ! 
L’occasion de démarrer une nouvelle aventure. « Je suis un homme de challenge, j’aime bâtir et développer. » La Vienne, il connaît bien. Une partie de sa famille y réside. Si l’établissement bénéficie d’une bonne réputation et de la clientèle du Futuroscope, l’équipe a déserté les lieux. Il recrute une vingtaine de personnes en faisant parfois jouer son réseau, vecteur d’une « entraide intelligente ». C’est ainsi qu’il rencontre Alain, responsable de salle, lui-même amateur de Harley-Davidson. 
« La base solide, c’est l’humain. Pour que les gens soient bien, on n’est pas à flux tendu. Je donne une vision, une impulsion et je partage mes expériences mais je ne suis pas restaurateur. Ici tout le monde est très opérationnel. » 
Son projet est déjà bien précis : ajouter des couverts en agrandissant l’espace et reprendre quatre à cinq restaurants dans la région. « Je vous garantis que les banques me suivront, comme la première fois. C’est le projet qui fait l’argent, pas l’inverse. » L’audace est toujours là. « Il faut oser se lancer, ne pas avoir peur de l’échec. » Comme son ami d’enfance Gary Daguisé, « 30 000 idées à la seconde », dont il avoue s’inspirer.

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