Les médecins disent 
« non à la coercition »

Une loi pour régler la problématique des déserts médicaux ? Dans la Vienne comme ailleurs, les médecins et futurs médecins s’y opposent et défendent leur liberté d’installation. Le texte revient cette semaine à l’Assemblée nationale.

Arnault Varanne

Le7.info

C’est assez rare pour être souligné. En début de semaine dernière, 80% des médecins libéraux de la Vienne se sont déclarés grévistes, fermant leur cabinet ou assurant a minima les « urgences ». « Cela montre une vive opposition au projet de loi Garot », assure le Dr Xavier Lemercier, président du Conseil de l’Ordre des médecins de la Vienne. A cette grogne s’est ajoutée mardi une manifestation de quelque 130 étudiants en médecine à l’université de Poitiers. Le mot d’ordre ? « Non à la coercition ! » 
« Mes parents vivent dans un désert médical, pourquoi ne pas m’y installer... Mais je ne veux pas qu’on me l’impose, souffle Emma, en 4e année. Nous faisons des études longues, compliquées et nous avons aussi envie de choisir notre lieu d’exercice. »

L’article premier de la proposition de loi Garot prévoit explicitement de « flécher l’installation des médecins généralistes et spécialistes vers les zones où l’offre de soins est insuffisante ». 
« Comment peut-on imaginer contraindre des médecins qui n’existent pas à s’installer sur certains territoires ?, s’interroge le 
Dr Lemercier, tout en figeant l’offre sur d’autres en n’autorisant que les remplacements. On va gérer de la pénurie avec de la pénurie ». « Déplacer les trous de gruyère, ça n’a jamais fait plus de fromage ! », ironisent les futurs praticiens, qui pourraient, eux, être tentés de « délaisser l’exercice de la médecine générale de premier recours ».

« Il faut creuser 
toutes les idées »

Dans la Vienne, 404 médecins généralistes exercent au quotidien. Toutes les zones ne sont pas des déserts médicaux (le Loudunais et le Lussacois le sont). « Mais essayez de chercher un médecin traitant à Poitiers ou Châtellerault, qui sont pourtant considérées comme des zones bien dotées », avance le président du Conseil de l’ordre. A l’appui de sa démonstration, le Dr Lemercier indique que même en prenant les données de l’APL (Accessibilité potentielle localisée), la situation reste très fragile. « L’APL détermine le nombre de consultations chez un professionnel par an et par habitant. On considère qu’en dessous de 2,5 consultations par an, on est dans une zone désertifiée, entre 2,5 et 4 une zone normale et au-dessus de 4 surdotée. Avec ce critère, seule Loudun est en zone sous-dotée, le Haut-Poitou et Grand Poitiers étant considérés comme surdenses... Les chiffres remontent à 2020. »

Opposé à la régulation de l’installation des médecins libéraux, le gouvernement a lancé son propre plan, dont la mesure phare consisterait à imposer jusqu’à deux jours par mois de consultations dans les zones prioritaires, en échange de contreparties financières. Là encore, la proposition est accueillie fraîchement, même si le Dr Lemercier ne « la balaie pas d’un revers la main. Il faut creuser toutes les idées mais ne pas penser que ce sont des solutions qui se décrètent, elles se construisent autour d’un projet, d’équipes pluridisciplinaires ». 
L’examen de la loi Garot reprend ce mardi à l’Assemblée nationale.

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