Le droit à l'oubli pour s'assurer un avenir

Un nouveau décret sur le droit à l’oubli est entré en vigueur le 15 février. La mesure permet aux personnes guéries du cancer depuis au moins dix ans de contracter une assurance de prêt bancaire, sans mentionner leur ancienne pathologie. Une véritable avancée pour les ex-malades.

Florie Doublet

Le7.info

En franchissant la porte de son agence bancaire, Marie-Estelle n’avait que « peu d’espoirs ». Atteinte d’un cancer du sein en 2013, cette Poitevine de 42 ans avait mis ses rêves d’achat entre parenthèses, avant de se lancer en février dernier. « Je me suis dit que la vie était trop courte, qu’il fallait que je tente ma chance, raconte-t-elle. Mais je suis restée lucide. Une femme seule, ancienne malade… Je partais avec de sacrés handicaps. » Néanmoins, Marie-Estelle a rencontré une conseillère « à l’écoute », qui a pris le temps de lui détailler ses droits, notamment ceux encadrés par la convention Aeras (S’assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé).

Cette convention, signée en 2007 par l’Etat et les professionnels de l’assurance, vient d’être complétée par un nouveau décret. Entré en vigueur le 15 février dernier, le droit à l’oubli permet aux personnes ayant été atteintes d’un cancer et de l’hépatite C de ne plus le mentionner lors d’une demande d’assurance pour emprunter. Elles évitent ainsi les exclusions de garantie ou les surprimes. « C’est une grande avancée, note Philippe Chartier, président du comité de la Vienne de la Ligue contre le cancer. Les anciens malades avaient la sensation d’être marqués au fer rouge, de subir une double peine. Il existait une véritable discrimination. »

Un premier pas 

Cette avancée ne résout pas tous les problèmes, dixit Serge Maître. « Pour bénéficier du droit à l’oubli, il faut que le processus thérapeutique soit achevé depuis au moins dix ans, » rappelle le président de l’Association française des usagers des banques (Afub). Cela signifie qu’une personne dont le cancer est guéri à 35 ans ne pourra emprunter, au mieux, qu’à 45 ans. « Résultat, les banques risquent de se montrer frileuses, craignant une baisse de revenus liée à la retraite, dans les dernières années du prêt… C’est un premier pas, mais il convient d’en faire d’autres. »

Si pour beaucoup d’anciens malades l’accès au prêt reste compliqué, d’autres, à l’image de Marie-Estelle, ressortent soulagés de leur entretien avec leur banquier. « Différentes pistes m’ont été suggérées, explique la future propriétaire. J’ai été rassurée, on ne m’a pas fermé la porte au nez. » « Les établissements bancaires se sont engagés à informer leurs clients sur les dispositifs existants, confirme Didier Pierron, président régional de la Fédération bancaire française. Les conseillers sont régulièrement formés, il ne faut pas craindre de les consulter, ils sont là pour aiguiller les emprunteurs. » De son côté, Marie-Estelle s’apprête à démarrer une nouvelle vie. « Je me projette, je pense à l’avenir. » Une deuxième victoire contre la maladie.

Contact Ligue départementale de lutte contre le cancer : 05 49 52 64 59

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