Le coin des bonnes enchères

Meubles, oeuvres d’art, voitures, timbres… Chaque année, environ cent vingt ventes aux enchères sont organisées à l’hôtel des ventes de Poitiers, dirigé par Bénédicte Boissinot et Hervé Tailliez.

Florie Doublet

Le7.info

« J’ai 3 000€ à ma droite, qui dit mieux ? Personne ? Adjugé ! » Début mars, les enchères sont montées très haut, au 14, boulevard du Grand-Cerf. Et pour cause. Cinquante-cinq photographies originales de Robert Doisneau ont été cédées aux plus offrants. Comme bien souvent, les pièces provenaient d’une collection privée, oubliée dans un grenier.

Si la vente « Doisneau » a eu un impact médiatique important, elle ne représente qu’une infime partie du travail de Bénédicte Boissinot et Hervé Tailliez, à la tête de l’hôtel des ventes de Poitiers depuis deux ans. « Chaque année, nous organisons près de cent vingt ventes, expliquent les deux commissaires- priseurs. Une partie des biens mis aux enchères provient d’entreprises placées en redressement ou liquidation judiciaire, une autre du crédit municipal de Poitiers, la troisième de propriétaires désireux de se séparer de certains objets. »

Livres, timbres, oeuvres d’art, meubles, voitures, produits électroménagers… Plusieurs dizaines de milliers d’objets en tous genres sont mis en vente. « Il y en a pour tous les besoins, toutes les passions et toutes les bourses, souligne Bénédicte Boissinot. Il nous est arrivé d’adjuger des lots à 1€. Et d’autres à plusieurs milliers d’euros. » Une gouache de Fernand Léger, « oubliée dans un grenier par son propriétaire », a ainsi été vendue 32 000€, hors commission. Sur chaque vente conclue, la société des deux commissaires-priseurs perçoit un pourcentage. « Le vendeur règle, en plus, de 14,40 à 21% du montant du lot, selon qu’il est vendu dans un cadre judiciaire ou volontaire. Le propriétaire, quant à lui, nous verse 6 à 18% de la somme adjugée. »

Internet rebat les cartes

Collectionneurs et « Poitevins lambda » se pressent aux portes de l’hôtel des ventes en quête de bonnes affaires. « En semaine, nous organisons les ventes dites « courantes » et, le weekend, les « thématiques » », précise Hervé Tailliez. Avant chaque événement, les objets sont exposés dans l’entrepôt pendant quelques heures. « Ici, l’objet est désacralisé, reprend le commissaire-priseur. On peut le voir de près, le toucher et demander des renseignements avant d’enchérir. »

Fait particulièrement nouveau, l’intégralité des lots est également présentée sur Internet, « pour les acheteurs qui ne peuvent ou ne souhaitent pas se déplacer ». « Les nouvelles technologies ont complètement bouleversé les codes, explique Bénédicte Boissinot. Aujourd’hui, on peut faire des enchères comme on fait ses courses au drive. »

Chaque vente est en effet diffusée en direct sur la toile, avec la possibilité pour les internautes de placer une enchère à tout moment. Aujourd’hui, 20% des objets adjugés par les commissaires- priseurs poitevins le sont par Internet. Au-delà de « l’instantané » de la vente, Hervé Tailliez et Bénédicte Boissinot consacrent la majeure partie de leur temps à faire des inventaires, organiser les prochains événements, expertiser les objets et estimer leur prix de vente. Ils côtoient les plus aisés comme les plus défavorisés. « Le panel social est hyper large, insiste Bénédicte Boissinot. Notre activité est pleine de contrastes. L’hôtel des ventes est un peu le reflet de la société. »

Hervé Tailliez et Bénédicte Boissinot sont les seuls commissaires- priseurs de Poitiers. La Vienne compte un troisième professionnel, Christophe Sabourin, installé à Châtellerault. En France, on dénombre 412 commissaires-priseurs, répartis dans 320 offices, soit six par million d’habitants. Pour exercer ce métier, il faut être détenteur d’un diplôme en droit et d’un autre en histoire de l’art, en arts appliqués, en archéologie ou en arts plastiques. Cette double qualification donne accès à l’examen d’entrée en stage de commissaire-priseur, qui est obligatoire et très sélectif. À l’issue de ce stage de deux ans, les candidats se voient décerner un certificat de bon accomplissement par le Conseil des ventes et peuvent alors exercer la profession.

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