Dominique Hummel : « J’ai tout aimé ici »

Le patron du Futuroscope Dominique Hummel quittera ses fonctions en mars 2018. Il nourrit de nombreux projets pour l’avenir. Et à 63 ans, il n’exclut plus de se lancer en politique. « L’intérêt pour le territoire, il est là. »

Arnault Varanne

Le7.info

A quel moment avez-vous pris la décision de quitter la direction du Futuroscope ?
« Je m’étais mis un « butoir » de quinze ans. En 2013, j’ai eu de très belles propositions, mais j’ai choisi de rester à la tête de l’entreprise car nous avons connu un recul (moins 300 000 visites, ndlr) qui nous a interpellés. Je ne me voyais pas quitter le navire… Je suis arrivé ici en novembre 2002, j’annonce mon départ en décembre 2017. Il y a quelque chose de l’ordre du symbole. »

Depuis un an et demi, vous dirigez de la direction de l’innovation au sein de la Compagnie des Alpes. Les deux événements sont-ils liés ?
« Ces missions occupent 40% de mon temps aujourd’hui et intéressent au premier chef le Futuroscope. Avec Dominique Marcel (président de la CDA, ndlr), nous nous sommes mis d’accord sur le scénario. Rodolphe (Bouin) fait partie du plan depuis un moment. Il était contrôleur de gestion avec Nicolas Kremer, qui aurait pu être un successeur. Il a bien évolué, en étant aux boutiques, aux ressources humaines… »

Vous avez ramené le Futuroscope à deux millions de visiteurs, redoré son image, restauré l’équilibre financier… Comment votre successeur peut-il sortir de cette ombre tutélaire ?
« Il y a une figure imposée et une figure libre dans la fonction. La figure imposée, c’est d’être ancré dans le territoire. La figure libre, c’est la manière dont lui va incarner le job. L’avenir sera différent, j’espère qu’il sera meilleur ! Il a un profil différent du mien. Il est entré au parc après la fac et a une énorme proximité avec les gens. »

« J’ai atteint ce niveau de sérénité »

Le moment était-il idéal ?

« Il n’y en avait pas de meilleur, avec les arrivées des attractions autour de Sébastien Loeb et Thomas Pesquet en 2018 et l’émergence du camp d’entraînement dans l’espace l’année suivante. Les négociations avec le Département sur le plan d’accompagnement (*) sont presque terminées. On a aussi passé le cap des 100M€ de chiffre d’affaires, des 20M€ d’excédent d’exploitation… Bref, le contexte me paraît très favorable. Ce que je devais faire, je l’ai fait, ce que je n’ai pas réussi à faire, d’autres le feront. J’ai atteint ce niveau de sérénité, même si je mesure assez bien ce que je vais perdre !»

Qu’allez-vous perdre exactement ?
« Je suis un type plutôt éclectique et curieux et la direction du Futuroscope m’a bien convenu pour ces raisons. Ici, vous mariez l’artistique et la gestion, le public et le privé, le local et le mondial. Et ne je parle pas des décharges d’adrénaline. Ce mélange est unique. Je n’aurais pas voulu diriger un autre parc que le Futuroscope. J’ai tout aimé ici. »

De quoi êtes-vous le plus fier ?
« Ma plus grande fierté, c’est sans aucun doute d’avoir rendu la fierté au personnel de travailler dans un parc comme le Futuroscope. Je pense que j’ai réussi à fédérer les gens autour d’un projet auquel ils ont fini par croire. »

« La politique ? Je ne refuse pas la question »

A partir de mars, on vous imagine mal jouer de la guitare au coin du feu. De quoi sera fait votre avenir ?

« Un peu plus quand même ! Je vais prendre des cours chez Syrinx. Plus sérieusement, j’ai un accord pour prolonger ma mission à la direction de l’innovation de la CDA pendant dix-huit mois, reconductible une fois. Dominique Marcel devrait me proposer d’être administrateur du Futuroscope. J’ai l’intention d’ancrer l’innovation au cœur de la Nouvelle-Aquitaine. Je vais vraisemblablement conduire une mission avec la CDA autour de la création de nouvelles activités en Occitanie. Mon deuxième tiers temps sera sur des activités pas liées à la CDA. Je travaille déjà avec Michelin autour de la restructuration de 35ha de friches, en plein cœur de ville. Il y a notamment les pistes, des bâtiments de 600m de long où l’on faisait rouler des pneus. Mes propositions ont été approuvées. Je vais également aider l’Alsace à monter un réseau des acteurs touristiques, mener une autre mission autour des 24h du Mans… Et mon troisième tiers temps sera consacré à des activités privées. Mon parti pris est assez simple : faire ce que j’ai envie de faire. »

Il y a quinze ans, après votre défaite aux Législatives, vous aviez indiqué vouloir tirer un trait sur la politique. Est-ce toujours le cas ?
« Je ne refuse pas la question, mais ce n’est absolument pas mûr dans ma tête. L’intérêt pour le territoire, il est là. La dynamique territoriale m’intéresse. Maintenant, il y a mille manières de continuer de nourrir ce lien. Le paysage politique a beaucoup changé. Emmanuel Macron a rebattu les cartes. Eux (La République en Marche, Ndlr) ont des enjeux d’ancrage. Je sais bien qu’on me prête des intentions, mais ces intentions vont plus loin que les miennes pour l’instant. Moi, je me nourris de projets et j’ai cette conviction qu’il faut fédérer. Ce sont les chemins qui nous inventent, laissons faire nos pas. »

(*) Le plan d’investissements la Compagnie des Alpes sur la période 2017-2022 s’élève à 65M€, dont 6 apportés par le Département, en tant que propriétaire du parc.

 

Il l’a dit aussi... 
« Le Futuroscope est quelque chose qui m’a complètement cannibalisé pendant quinze ans, pour mon plus grand plaisir. »

« Au Futuroscope, on a gardé les deux éléments clés, le futur et les images, mais on les a inversés. Le parc a enfin une ligne éditoriale autour des spectacles vivants, des images, des attractions mécaniques et des parcours. »

« René Monory a eu l’intuition géniale du thème du futur dans les années 80, mais il ne pouvait pas prendre de la même manière vingt ans plus tard. »

« Les Lapins crétins, c’est le miracle de la marque. Sans eux, on n’en serait pas là aujourd’hui. »

« J’ai découvert les Lapins crétins au cours d’un dîner à Paris. Je ne connaissais pas en toute honnêteté. »

« Il y a eu plusieurs disruptions dans l’histoire du Futuroscope : les attractions mécaniques, les marques, l’arrivée de la Compagnie des Alpes et la loi NOTRe. »

« Center Parcs est un enfant financier du succès du Futuroscope. »

« L’un des enjeux dans le parc, c’est que les gens personnalisent mieux leurs visites, que les choix qu’ils font correspondent mieux à leur profil. »

« J’ai fait une proposition au pôle territoire de l’université de Poitiers de faire enfin du Futuroscope un objet d’études. Je veux aussi m’impliquer à Sup de co La Rochelle pour des formations autour du tourisme. »

 

 

 

 

 

 

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