Les œufs dans tous leurs étals

De plus en plus de Français adoptent des poules pondeuses. Phénomène de mode ou véritable retour aux sources de l’alimentation, cette tendance apparaît gagnante au moment où le prix de l’œuf devrait augmenter.

Romain Mudrak

Le7.info

Les poules sont entrées dans la ville ! Depuis quelques années, elles se font une place dans les zones les plus urbanisées. Malgré les renards et... les chats de gouttière, ces gallinacés seraient deux millions à gambader tranquillement dans les foyers français ou dans des poulaillers communautaires installés par des Villes. Il n’y a qu’à interroger les enseignes de jardinerie de Poitiers et Châtellerault pour se convaincre du phénomène. Cécile habite dans le quartier de Saint-Eloi, à Poitiers. Son fils de 15 ans Younès rêvait d’avoir des poules. Après son emménagement dans une maison avec jardin, la famille a donc adopté Soquette et Zina. « On leur donne du grain mais aussi toutes les épluchures, les croûtes de fromage..., raconte cette Poitevine. Avec deux poules, on récupère jusqu’à trois œufs frais chaque jour. C’est tellement meilleur. » Très discrètes, les poulettes caquettent seulement quand elles ont pondu. Pas de quoi gêner les voisins qui sont très heureux de récupérer le surplus de la production.

Elevées en plein air
Du coup, Cécile n’a pas acheté une boîte d’œufs au supermarché depuis six mois. Les économies réalisées ne sont pas négligeables, même si ce n’était pas le motif premier de la démarche. En tout cas, grâce à Soquette et Zina, cette mère de famille devrait échapper à la hausse annoncée du prix de l’œuf. C’est officiel ! D’ici la fin de l’année, le coût de revient pour les éleveurs devrait croître de 10% et se répercuter tout ou partie sur le client final. « Depuis décembre dernier, le cours des céréales augmente, explique Loïc Coulombel. Et la sécheresse de l’été a accentué le phénomène en réduisant les rendements. Or, 65% du prix de revient est composé de l’alimentation. » Le PDG de Liot, à Pleumartin, une entreprise spécialisée dans les ovoproduits liquides ou en poudre, a une vision particulièrement fine de la situation. Et pour cause, il est également président du syndicat national des industriels et professionnels de l’œuf (Snipo). A l’heure d’acheter la bûche de Noël, cette situation entamera certainement une nouvelle fois le pouvoir d’achat des consommateurs.

Si les poules de Cécile sont élevées en plein air, les « pondeuses professionnelles » exercent souvent à l’usine. Sous la pression des consommateurs, la filière s’est engagée à produire 50% d’oeufs « alternatifs » (volières, plein air ou bio) d’ici 2022, contre 37% aujourd’hui. Actuellement, sur les 2 100 élevages, 500 utilisent encore des cages, mais ce sont les plus importants. L’objectif est donc ambitieux. Selon les professionnels de la filière, cette (r)évolution coûtera 280M€ aux éleveurs. Qui réglera la note ? Sans aucun doute le consommateur.

 

En chiffres
14,9 milliards d'oeufs produits en 2017. La France est le premier producteur d'oeufs de l'Union européenne. La distribution s'effectue sur trois marchés :
- Les grandes surfaces, hard discount, enseignes spécialisées : 43%
- Les œufs destinés à la transformation par l'industrie agroalimentaire : 40%
- Les œufs coquilles et ovoproduits pour la restauration à domicile : 10%
- et un peu d'autoconsommation : 4 à 5%

2100 élevages dont 500 en cages
4100 emplois directs et indirects
1,3 milliards d'euros de chiffre d'affaires

L'engagement de la filière : 50% d'oeufs « alternatifs » d'ici 2022 (37% aujourd'hui dont 20,1% de plein air avec ou sans label rouge ; 6,4% en volière ; 10,5% en bio).

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