Sport et argent, cocktail détonant

Les collectivités locales versent-elles assez de subventions aux clubs sportifs professionnels de la Vienne ? Certains en doutent, mais la réalité de la situation est plus compliquée à appréhender.

Arnault Varanne

Le7.info

Après la soirée événement (réussie) du 30 mars à Saint-Eloi, le président du Grand Poitiers handball 86 Jean-Marc Mendès s’est lâché sur les réseaux sociaux, dénonçant la faible contribution de la communauté urbaine à son club (2 500€, ndlr), soit « deux soirées de coût d’arbitrage ». Au passage, l’ambitieux expert-comptable oublie un peu vite l’autre subvention -de 46 000€- que Poitiers verse au PEC Handball, l’une des composantes du… Grand Poitiers hand 86 (27 000€ lui revient par convention). En creux, il pose cependant une question légitime : les collectivités locales aident-elles assez les clubs de haut niveau voire professionnels à performer ? 

Là-dessus, un peu de pédagogie s’impose. Car au-delà des subventions brutes (*), il faut aussi compter les aides indirectes. « Par exemple, le fait de mobiliser des agents toute une nuit pour transformer la salle Jean-Pierre-Garnier en salle de volley, à l’occasion d’un match de coupe d’Europe, a un coût », rappelle Pierre Michon, directeur général adjoint de Grand Poitiers en charge de la jeunesse et de la vie sportive. Autrement dit, il serait réducteur de ne considérer qu’une seule enveloppe. A la Région, l’harmonisation entre Limousin, Poitou-Charentes et Aquitaine a donné des sueurs froides à beaucoup de présidents de clubs. « Aujourd’hui, commente Nathalie Lanzi, notre politiqueconsiste à les aider aussi sur des dépenses d’investissements. Acheter un mini-bus, refaire une salle de musculation (SA XV), des vestiaires (Soyaux football) ou des tribunes contribuent à les faire progresser… » La vice-présidente de Nouvelle-Aquitaine incite les clubs à développer le partenariat privé, « comme le PB86, les Chamois niortais et le Stade rochelais le font ensemble depuis plusieurs mois ». 

Des ambitions à la hauteur de ses moyens

Au Poitiers Basket 86 justement, la manne publique représente 835 000€, soit 40% du budget de la saison. « Le reste se répartit entre le privé et les recettes propres », indique son président Louis Bordonneau. Lui ne se hasarde pas à « critiquer les collectivités locales car elles ont aussi des contraintes ». Non, l’ancien responsable bancaire sait qu’il doit « aller chercher du sponsoring privé, notamment dans le bassin châtelleraudais et au national »« A nous d’être meilleurs ! »Philippe Lion, le co-président du TTACC 86, dresse le même constat mais reconnaît que la tâche est ardue en raison de « la faible exposition de son sport ». L’an passé, le champion de France avait refusé de s’engager en coupe d’Europe faute du budget nécessaire. Le Stade poitevin volley beach avait fait le choix inverse, y a laissé des plumes et son entraîneur Brice Donat a exhorté les collectivités à davantage de soutien. « On a l’habitude que les présidents de clubs demandent plus,observe Pascale Guittet, vice-présidente du Département en charge des Sports. De notre côté, nous sommes à notre place avec une politique d’attribution très claire. » Niveau de compétition, impact médiatique, animation du territoire… Autant de critères qui comptent à l’heure de faire les comptes ! 

(*) 200 000€ pour le PB86 et autant pour le Stade poitevin volley beach. Le Département leur octroie respectivement 216 000 et 140 000€. Le Poitiers TTACC 86, champion de France en titre, touche 130 000€ des trois collectivités (Région, Département, Grand Poitiers), soit 50% de son budget (260 000€).


Certains sports en péril ? 
Pour Christophe Lepetit, « la tendance n’est ni à un désengagement massif des collectivités, ni à un soutien très fort ». « On s’aperçoit que certaines villes intègrent pleinement les clubs professionnels dans leur stratégie marketing », abonde le responsable des études économiques et des partenariats au Centre d’études et de droit du sport de Limoges. Selon cet observateur averti, le vrai sujet d’inquiétude concerne « les disciplines qui n’arrivent pas à développer une économie propre à base de recettes commerciales et de droits télé ». 

 

 

DR Jordan Bonneau

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