Plastique alimentaire : 
le CHU doit mieux faire

Les barquettes plastiques à usage unique sont de plus en plus bannies de la restauration collective, pour des raisons écologiques et sanitaires. Mais, au CHU de Poitiers, la majorité des patients mangent toujours dans ces contenants. Un problème.

Arnault Varanne

Le7.info

Avec l’intégration des sites de Châtellerault et Loudun, en plus de ceux de Montmorillon et Lusignan, le CHU de Poitiers sert désormais chaque année 2,4 millions de repas, soit 32% de plus qu’avant le 1er janvier 2021. David Briand est persuadé qu’on peut « bien manger à l’hôpital, très bien même, à partir du moment où on respecte les champs d’expertise de chacun car l’alimentation fait partie de la chaîne du soin ». Mais le responsable de la restauration au sein de l’établissement sait aussi que « 2,11€ pour faire un repas, ce n’est pas assez pour soutenir la réglementation de la Loi Egalim, substituer les barquettes plastiques et les micro-ondes par des bornes et des navettes de remise en température. »

L’ingénieur de restauration touche ici un point sensible, auquel Isabelle Pironneau, attachée de recherche clinique au CHU, aurait voulu consacrer un essai clinique. Son thème : l’alimentation en milieu hospitalier. Sa hiérarchie n’a pas souhaité qu’elle poursuive ses travaux sur son temps professionnel, ne soutenant pas sa démarche plus longtemps. N’empêche que l’ancienne infirmière a continué ses recherches. « Avec d’autres, on s’est aperçu que le plastique n’était pas idéal en termes de qualité de cuisson, mais qu’au-delà le fait d’utiliser des micro-ondes, sauf en gériatrie, posait des questions sur le plan sanitaire. »

« Un problème de santé publique »

« Quand vous chauffez des barquettes plastiques au micro-ondes, vous arrivez très vite à des températures de fusion des polyéthylènes ou polypropylènes, avec potentiellement un phénomène de relargage du contenant vers les aliments, détaille Pascal Carato, professeur en chimie thérapeutique à la faculté de médecine de Poitiers. Ces produits peuvent être perturbateurs endocriniens et ce n’est pas la dose qui fait l’effet. A très faible dose, on peut avoir un effet sur l’individu, notamment chez les fœtus, les enfants... On peut générer des pathologies qui se développent, cinq, dix, quinze ans plus tard, comme des cancers, de l’obésité, du diabète. C’est un problème de santé publique. » La direction du CHU reconnaît travailler sur le sujet mais indique que les micro-ondes sont présents « principalement dans la tour Jean-Bernard ». Au-delà, la directrice logistique au CHU Béatrice de la Chapelle indique qu’un marché a été notifié pour « substituer les barquettes plastiques par des barquettes à base de cellulose, de bio-plastique, d’algue ou d’amidon ». De la coupe aux lèvres, il y a cependant loin. Et les investissements sont nécessairement conséquents, même si le CHU en a les moyens.

Force est de constater qu’il n’existe pas aujourd’hui d’alternative 100% satisfaisante, en dehors de l’inox, du verre et de la céramique. « Il ne faudrait pas réaliser une mauvaise substitution, prévient Pascal Carato. D’autres produits ont aussi une certaine toxicité, c’est le cas de la cellulose, du bambou, de l’acide lactique. Le système est complexe. » Comme d’autres établissements de restauration collective, le CHU de Poitiers a jusqu’au 31 décembre 2024 pour éliminer les contenants alimentaires en plastique de sa chaîne de production. C’est ce qu’exige la loi EGAlim (cf. repères), adoptée en octobre 2018.

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