Le revenu de base au milieu du gué

Dix-huit Départements ont voulu l’expérimenter en 2018, mais la loi les y autorisant n’a jamais vu le jour. Peu présent dans la campagne présidentielle, le revenu de base ou universel est pourtant une idée qui fait son chemin... jusqu’à Buxerolles samedi.

Arnault Varanne

Le7.info

On ne peut pas dire que l’idée colonise les bandeaux des chaînes d’info en continu. On ne peut pas dire non plus qu’elle est complètement absente des débats de la campagne présidentielle. Candidat à la Magistrature suprême, le philosophe libéral Gaspard Koenig remet sur le devant de la scène l’idée d’un revenu universel ou de base, déjà portée en 2017 par le socialiste Benoît Hamon. L’écologiste Yannick Jadot évoque dans son programme la nécessité d’un 
« revenu minimum garanti pour chaque adulte, sans emploi ou avec de faibles revenus, sans contrepartie et dès la majorité ».


« Le nom importe peu, c’est le contenu et la finalité qui le sont »
, estime Bertrand Duprat, membre du Mouvement français pour un revenu de base (MFRB). L’allocation repose sur cinq piliers. Elle serait universelle, individuelle, inconditionnelle, cumulable avec d’autres aides et à vie. De quel montant ? 
« Tout dépend du pays, mais en France il faudrait se situer entre 1 000 et 1 200€ par mois, ce qui correspond au seuil de pauvreté », ajoute l’ancien juriste, attendu samedi à Buxerolles(*). Là où à droite la mesure a plutôt vocation à supplanter certains minima sociaux, à gauche elle s’y ajoute, ainsi qu’aux revenus du travail. Le MFRB plaide en effet pour édifier « un nouveau pilier de la protection sociale », d’abord pour « lutter contre la pauvreté », ensuite pour « anticiper la disparition d’un certain nombre de métiers automatisés », 
enfin pour « mieux redistribuer les richesses produites ».

La Gironde veut l’expérimenter

Dès 2016, dix-huit Départements français (cf. édito) ont proposé d’expérimenter un revenu universel dédié aux 18-24 ans. « Avec des conditions », précise cependant la collectivité, notamment la fusion du RSA et de la prime d’activité voire des APL. Le montant (entre 550 et 750€) aurait été versé automatiquement, y compris à ceux qui n’auraient pas fait valoir leurs droits. Mais aucun projet de loi n’a permis la mise en place de l’expérimentation. 
« On continue à clamer notre envie de le tester. Le président de la République en a parlé il y a peu (Emmanuel Macron a évoqué un revenu universel d’activité englobant l’ensemble des prestations, ndlr), alors... », ajoute la Gironde.

En réalité, deux questions majeures se posent : comment financer le revenu de base et le dispositif inciterait-il à travailler ? 
« En Inde, en Namibie ou il y a plus longtemps au Canada (Dauphin, au milieu des années 70, ndlr), le nombre d’heures travaillées n’a pas diminué, bien au contraire », note Bertrand Duprat. « Le mythe de l’oisiveté est plutôt une crainte de ceux qui ont du boulot et davantage une barrière psychologique que rationnelle », note pour sa part Etienne Maier. Le Poitevin est directeur de l’engagement et de la vie associatif à l’Unicef. Pour lui, le revenu de base fournirait 
« beaucoup de réponses à la crise économique, sociale, écologique et démocratique ». S’agissant du coût, le membre du MFRB l’évalue « entre 600 et 700Md€ par an », à financer grâce à « une taxe de 2% sur les transactions financières. Et il faut voir que le revenu universel serait source d’économies sur le chômage, les retraites, la santé, etc ». « Ce n’est absolument pas une utopie ! », 
conclut Etienne Maier.

(*) A l’initiative de l’association La Nouvelle Vie Poitiers, de 20h à 22h à la Maison des projets de Buxerolles.

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