Avec Jean Valjean, Eric Besnard explore la rédemption d’un homme d’abord façonné par sa colère. Sans prendre de risques, le réalisateur parvient à pousser à l’introspection… quitte à être un peu trop moralisateur.
Nous sommes en 1815. Jean Valjean (Grégory Gadebois) sort du bagne après dix-neuf ans passés dans les carrières de Toulon, rongé par l’injustice et la colère. Amer, défiant et, osons le dire, sacrément impoli, l’homme se heurte à de nombreuses portes closes jusqu’à trouver refuge chez Monseigneur Myriel (Bernard Campan), sa sœur Baptistine (Isabelle Carré) et leur servante légèrement acariâtre, Magloire (Alexandra Lamy). Difficile pour tout ce petit monde de se sentir pleinement en confiance. Et si ce vaurien les volait ? Ou pire ! Pourtant, et contre toute attente, cette nuit brise l’armure de haine qui entoure le forçat, le poussant à choisir entre sa colère et la possibilité d’un nouveau départ. Jean, qui partait de loin, devient alors bon et altruiste. Ainsi est né le plus célèbre des personnages des Misérables. D’emblée, Eric Besnard opte pour un cadre minimaliste avec un huis clos épuré, presque monastique (et un peu oppressant). Un parti pris visuel, discret qui renforce l’introspection. Très amaigri pour le rôle, Grégory Gadebois, incarne avec intensité et retenue un Valjean torturé, dont la colère et la douleur sont palpables à chaque instant. Face à lui, Bernard Campan en Monseigneur Myriel apporte une bienveillance mesurée qui rend crédible le basculement du bagnard vers la rédemption. Isabelle Carré et Alexandra Lamy complètent ce petit noyau familial avec justesse. Sur le fond, le film réussit à mettre en lumière le parcours moral et profondément humain, au-delà de la violence, et insiste sur la possibilité de la seconde chance. Mais Jean Valjean n’est pas exempt de failles. Des flashbacks trop nombreux dans lesquels le spectateur se perd, quelques plans superflus et des longueurs font en effet partie du tableau. Certains pourraient également reprocher au réalisateur de ne pas approfondir l’univers de Victor Hugo mais c’est précisément ce choix qui fait sa force : c’est l’étude d’un homme, pas une fresque épique. On peut alors aisément voir Jean Valjean comme une fable sobre et humble sur la rédemption qui ravira tous les amateurs de morale. Les autres pourraient en effet se lasser devant tant de bons sentiments…
Drame d’Eric Besnard avec Grégory Gadebois, Isabelle Carré, Alexandra Lamy (1h38).
DR