Tout fout le camp

Limoges ne s’était plus imposé à Poitiers depuis 2004. A la faveur d’une fin de match bien mieux maîtrisée, le CSP a remporté le derby de la peur et plongé le PB86 dans un océan de doutes. Le maintien s’éloigne inexorablement…

Arnault Varanne

Le7.info

Les semaines se suivent et se ressemblent aux Arènes. Quinze jours après une première désillusion face à la lanterne rouge Boulazac, le PB86 s’est payé un remake du même tonneau dans « Le » derby de l’année. La balle de la gagne, une prolongation et une défaite au goût amer. Comme à Beaublanc, le 19 novembre dernier, Poitiers a longtemps cru pouvoir se payer le scalp du CSP. Et comme en Haute-Vienne, Ruddy Nelhomme et ses hommes terminent la soirée avec une vilaine gueule de bois. Le mal de tête se prolongera sans doute au-delà du week-end, jusqu’à ce fameux débrief vidéo dont l’effet sur les nerfs poitevins sera, hélas, immédiat.

75-75, 24 secondes à jouer. Jean-Michel Mipoka vient de remettre son équipe sur les rails d’une victoire possible grâce à un triplé venu d’ailleurs. Temps mort du PB. James hérite du cuir, charge à lui de manger le chrono -et non de prendre un tir longue distance-, avant de s’en remettre à Ahmad Nivins. La consigne est respectée à la lettre. Le natif de Jersey City enfonce Brockman, mais l’intérieur limougeaud (19pts, 6rbds) joue fort bien le coup et oblige Nivins à prendre un tir difficile dos au panier. Raté ! On se dit alors que l’extra-time va enfin sourire aux Arènes. Nivins accrédite d’ailleurs la thèse avec deux lancers francs pleins de sang froid. Las… McAlarney d’abord puis Wanamaker profitent des errements défensifs du PB pour appuyer là où ça fait mal. Jusque-là en réussite, James et Kanté s’éteignent définitivement (80-88, 40e), à l’image de leurs coéquipiers. Silence de mort.

 

Kanté pyromane, Boungou-Colo pompier de service 

 

Oui, le PB a eu les munitions pour « tuer » ce derby de la peur. A 1’58’’ de la fin du temps réglementaire, Poitiers menait encore de sept unités (75-68). Seulement voilà, cette saison, le Petit Poucet ne sait plus conclure, marqué au fer rouge par un manque de confiance quasi-pathologique. Chalon, Paris, Boulazac, Limoges deux fois… L’addition commence à être salée et la route du maintien devient de plus en plus étroite. Et pourtant, lorsqu’il s’applique, ce groupe dégage une impression de force rarement vue entre Boivre et Clain.??On a d’ailleurs aimé la réaction d’orgueil qui l’a animé face au CSP, au sortir d’un premier quart cauchemardesque (13-20, 10e).  D’abord au pain sec en attaque (trois tirs réussis en dix minutes) et tendus par l’enjeu, les Poitevins ont démarré piano, sauvés des eaux par la paire Dobbins-Kanté aux lancers francs. En face, le trio Mipoka, Plaisted-Brockman s’est d’abord goinfré des espaces offerts. Un scénario qui n’aura duré que dix minutes. Le temps que Lamine Kanté (26pts au total) ne prenne feu au-delà de la ligne des 6,75m. Quatre triplés presque à l’affilée, une défense resserrée et un 16-1 passé aux boy’s de Giannakis en moins de cinq minutes (32-24, 15e). Il y a le feu dans la maison verte et Nobel Boungou-Colo (19pts) est obligé d’enfiler le costume du pompier de service derrière l’arc (35-30, 16e). Brockman joue les murailles face à Badiane parti au cercle, tandis que Dobbins (10pts, 8rbds, 3pds) s’offre un dunk énorme en contre-attaque.

Bref, le PB roule grand train à ce moment-là, sûr de son basket. L’embellie dure au-delà de la mi-temps, grâce à un Dominic James intenable à mi-distance (59-52, 27e). Mais le chantier entrepris par Plaisted dans la raquette poitevine ne laisse rien augurer de bon. Une impression qui se confirme avec la montée en puissance de Gipson. L’ancien arrière palois se transforme en poison pilote et c’est tout le CSP qui se met à rêver d’un emballage à son avantage, grâce aussi à un jeu juste, caractérisé par très peu de pertes de balle (trois en deuxième mi-temps) et vingt-trois passes décisives. La suite, vous la connaissez… Mipoka égalise et les Arènes, jusque-là fringantes, déchantent. Une sale habitude. A se demander si le petit coup de pouce du destin dont le PB bénéficie chaque saison, mais qu’il provoque, se produira un jour. Il y a désormais urgence car, à ce rythme, Poitiers file vers la Pro B. Tout fout le camp…   

 

Photo Seb Jawo

 

La fiche

A Poitiers, salle des Arènes PB86-Limoges : 80-88 (75-75, ap). Mi-temps :  40-34. Evolution du score : 13-20, 40-34, 63-58, 75-75, 80-88. 4650 spectateurs. Arbitrage de MM. MM. Jeanneau, Lepercq et Vansteene. 

 

POITIERS. James (22), Dobbins (10), Nivins (6), Smith (6), Kanté (26), Grant (3), Guillard (5), Badiane (2), Dallo, Harley, Fall. Entraîneur : Ruddy Nelhomme. 

LIMOGES. Mc Alarney (4), Gipson (12), Plaisted (12), Wanamaker (13), Brockman (19), Boungou-Colo (19), Traoré (2), Gomis (2), Mipoka (5), Evtimov, Zerbo. Entraîneur : Panagiotis Giannakis. 

 

Ils ont dit…

 

Ruddy Nelhomme (entraîneur de Poitiers) : « On se met en difficulté, on est marqués par certaines choses qui nous arrivent et qui se répètent de match en match. Il y a beaucoup de déception ce soir et nous sommes énormément en danger en perdant autant chez nous. On va se battre, tout donner pour essayer d’éliminer ça. A la fin, il y a eu un ou deux mauvais choix en attaque, quelques erreurs en défense. Bref, c’est un ensemble de choses. On n’arrive pas à prendre les bonnes décisions. Tout ça met le club en danger. »

 

Panagiotis Giannakis (entraîneur de Limoges) : « On a vu un très bon match, les deux équipes ont tout donné. On s’attendait à ce que Poitiers commence nerveusement, mais cette équipe est revenue dans la partie avec des tirs à trois points. Après onze à douze minutes, on a fait quelques erreurs. D’abord en défense. Mais mon équipe n’a jamais paniqué. Nous avons continué à bien travailler. J’ai dit aux joueurs qu’il ne fallait pas qu’ils paniquent car Poitiers n’allait pas continuer à mettre des tirs tout le match. A la fin, on a joué un très bon basket. Je suis très fier de mes joueurs. C’est notre plus belle victoire de la saison, avec une grosse pression. »

 

Lamine Kanté (ailier du PB86) : « Encore une fois, on a paniqué. On perd tous nos moyens. Ils prennent des rebonds, on ne sait plus comment attaquer. Tous les petits détails font la différence. On a beau dire que Dominic prend tous les shoots. En même temps, nous on a peur ! Il reste sept matchs, il va falloir s’accrocher. Hélas,  on n’y arrive pas dans cette salle. »

 

Dominc James (meneur du PB86) : « Ce soir, je suis vraiment frustré. J’ai fait confiance à Ahmad ce soir, malheureusement son panier n’est pas rentré. Mais je continuerai à lui faire confiance, comme à tous mes autres coéquipiers. Nous devons continuer à travailler, rester solidaires et ne rien lâcher pour donner une victoire aux fans. Ce qui me dérange un peu, c’est que certaines équipes jouent pour gagner. Nous, on joue pour ne pas perdre donc il n’y a pas le même sentiment d’urgence en fin de match. »

 

Tony Dobbins (arrière du PB86) : « C’est difficile de continuer à perdre comme ça. C’est encore un match qui se joue dans les dernières minutes. Ruddy a demandé une bonne action pour Ahmad, comme contre Le Havre. Mais il a juste raté le panier. Après, on a bien démarré les prolongations avec un panier, une faute. Mais Limoges a marqué deux-trois paniers importants. On manque de confiance, pourtant l’équipe joue bien pendant longtemps. Il nous manque quelques actions pour attraper les matchs. »

 

Brad Wanamaker (arrière de Limoges) : « Nous  avons travaillé très dur pour arriver à ce genre de résultat. Ce match, il était pour nous. Maintenant, il faut terminer la saison très fort. On a réussi à rester dans la course et à terminer devant. C’est une très bonne chose de se rapprocher de ce maintien et, pourquoi pas, de penser aux play-offs dans un coin de la tête. On va y arriver. »

 

 

 

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