Le « DMP » à la relance

Présenté, il y a déjà plus de dix ans, comme l’outil indispensable à la coordination des soins du patient, le Dossier médical personnel (DMP) peine à trouver son rythme de croisière. Pour changer la donne, les médecins de l’Union régionale des professionnels de santé (URPS) vont prochainement initier, dans la Vienne, une expérimentation unique en France.

Nicolas Boursier

Le7.info

A l’origine, le principe était louable. A l’origine, tout semblait clair. A l’origine, nul ne pensait que l’évidence mettrait autant de temps à embrasser les consciences. Onze ans après que le Dossier médical personnel a été porté sur les fonts baptismaux, une autre évidence, hélas plus consternante, affleure : le bébé ne marche pas, il claudique.
Avec quatre mille DMP ouverts à ce jour et 60 à 70% d’entre eux régulièrement alimentés, Poitou-Charentes se situe certes dans la fourchette haute des élèves assidus. « Ce n’est pas suffisant, assène Philippe Boutin, président de l’Union régionale des professionnels de Santé, section médecins. Le DMP devrait être universel, comme la Carte Vitale. Il ne l’est toujours pas et c’est dommage. »
Dommage, mais nullement incompréhensible, tant les entraves à sa démocratisation semblent encore nombreuses. La plus prégnante est sans conteste « le manque de temps » dont se plaignent médecins de ville et hospitaliers pour assurer des missions s’ajoutant à leurs tâches quotidiennes. « Les professionnels ont pourtant tout intérêt à mieux collaborer, appuie le Dr Boutin. Lorsque vous pouvez accéder, d’un seul clic, à toutes les données médicales d’un même patient, c’est la coordination, et donc la continuité des soins, qui est optimisée. »

Les biologistes donnent le la
Plus que jamais, l’URPS Poitou-Charentes est déterminée à passer la vitesse supérieure. Grand soleil à l’horizon, elle peut se targuer d’être largement suivie dans son engagement. Un travail collaboratif réunissant, entre autres, le CHU de Poitiers, l’hôpital de Châtellerault, la Caisse nationale d’assurance maladie et l’URPS section biologistes, est ainsi sur le point de déboucher sur une expérimentation unique en France : l’installation, au centre de prélèvements Bio86, à Poitiers-Sud, d’une borne numérique, grâce à laquelle les visiteurs qui le souhaitent pourront activer leur dossier personnel. « Les biologistes se situent au cœur de la chaîne médicale, toutes les demandes d’examens passent par eux. Qu’ils soient les premiers à disposer d’un tel équipement nous est apparu logique. » L’homme qui parle se nomme Xavier Auguay, dirige la société Icanopée et a été chargé de développer les technologies propres au DMP. « Avec l’obsession d’en faire un outil simple d’utilisation », tient-il à ajouter.

Mise en compatibilité
Le succès de l’expérimentation, soutenue par l’Agence régionale de santé, passe désormais par la compatibilité dudit outil avec les logiciels métiers des différents professionnels. « Le processus est lent, reconnaît Dominique Desmay, directeur du Groupement de coopération sanitaire GCS Esanté Poitou-Charentes, qui a, entre autres missions, de promouvoir le DMP et le partage de données médicales. Nous touchons toutefois au but. J’espère que ce sera l’affaire de deux ou trois mois, car rien d’autre ne semble s’opposer à sa mise en œuvre. »
A terme, lorsque la borne fonctionnera, les résultats d’examens biologiques, présents et passés, seront directement « virés » sur le compte du patient. Lequel compte sera alors consultable à distance par les professionnels de santé disposant d’un code d’accès au site www.bio86.net.  « L’idée, poursuit le Dr Boutin, est qu’au-delà de cet accès au dossier, médecins hospitaliers et de ville, infirmières, kinés…  prennent le temps de lui donner de la matière. » Onze ans que l’on attend cela !...
 

Photo Olivier Le Moal - Fotolia.com

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