Chocolat show

Jean-Claude Berton. 62 ans. Maître artisan chocolatier depuis plusieurs décennies. Résolument décalé, le Châtelleraudais s’efforce de réconcilier plaisir gustatif et bienfaits thérapeutiques. Signe particulier : un caractère bien trempé.

Arnault Varanne

Le7.info

A 62 ans, il n’a plus envie de « s’emmerder avec les cons ». Avec tous ceux qui, au mieux, moquent ses manières d’artisan « mal dégrossi », au pire raillent ses talents de chercheur d’alchimie. Depuis 2006 et sa conversion au bio, Jean-Claude Berton n’en finit plus soit d’exaspérer, soit de susciter l’admiration. Ses collaborations avec le Professeur Henri Joyeux, matérialisées par deux livres (*), n’ont pas apaisé les critiques des contempteurs de l’Omégachoco. Lui persiste et signe. « Son » chocolat » a des vertus auprès des consommateurs atteints de troubles du sommeil, de constipation… 

« Ce n’est pas moi qui le dis, ce sont les gens qui achètent l’Omégachoco. Regardez, ce qu’ils écrivent sur les comptes rendus de dégustation… » Et l’artisan d’Availles-en-Châtellerault d’exhumer des centaines de pages devant le plumitif, avec force détails en guise de preuves scientifiques. Le chocolatier est tellement convaincu de son produit -et des bienfaits de la fermentation, des antioxydants ainsi que des Omégas 3- qu’il parcourt la France et le monde entier pour le clamer. Fin janvier, il exposait au « Winter fancy food show » de San Francisco. Le mois prochain, il donnera des conférences dans l’Hexagone, devant des auditoires toujours plus réceptifs. Alors, oui, il « emmerde les cons ». 

Une idée chasse l’autre

Que voulez-vous, le fils d’assureur au caractère affirmé s’est toujours mué en empêcheur de tourner en rond. Chez lui, une idée chasse l’autre et son aboutissement l’obsède. « J’ai très tôt su que je n’étais pas un mouton blanc qui suivrait le troupeau », expose le fondateur du Festival du chocolat de Châtellerault, 16 ans au compteur. 16 ans, c’est aussi l’âge auquel ce « fort en gueule » a embrassé la carrière d’apprenti pâtissier. « Pour être exact, j’avais démarré à 13 ans à la pâtisserie Gaudin, où mon cousin apprenti travaillait déjà ! » La suite, c’est un titre de meilleur apprenti de la Vienne, un passage par l’Hôtel de France, à Poitiers, des expériences en Normandie avec la rencontre de son épouse, des « piges » parisiennes. Et le service militaire, bien entendu ! « Pour de nouvelles rencontres. C’est l’histoire de ma vie, ça. »

Loin de se soustraire à ses obligations, le Viennois est affecté à la base militaire d’Hourtin. Refuse une affectation sur la Jeanne d’Arc. Devient le chouchou des officiers. Prépare des gourmandises pour 2 500 matelots. Et file après vers d’autres destinations, notamment Bègles et Le Bouscat. Mais c’est plus tard que le titulaire d’un Brevet de maîtrise en pâtisserie contrôlera son destin. D’abord en ouvrant une boulangerie-pâtisserie avenue Leclerc (Châtellerault), ensuite en lançant des spécialités restées célèbres, comme « Le Châtelleraudais » ou « La boule du Futuroscope ». D’Edith Cresson à René-Monory, le chocolatier a « toujours osé » pousser la porte des puissants. Jusqu’à parfois saturer l’espace. 

« Toujours dire la vérité »

Mais parce qu’il est passionné, curieux, opiniâtre et surtout authentique, on lui pardonne facilement ses excès. « J’ai le sentiment de toujours dire la vérité. Attention, cela ne signifie pas que j’ai toujours raison, loin de là ! » Dans son aventure professionnelle, Jean-Claude Berton a embarqué son épouse et son fils. Sa fille « donne » dans le commerce international, depuis Paris. Un goût immodéré du voyage qu’elle a sans doute hérité de son paternel, éternel chercheur de fèves de cacao. Tous les ans, le maître artisan s’attache à rencontrer les producteurs en Amérique du Sud, mais aussi à développer l’export. Là encore, il garde en réserve des tonnes d’anecdotes. « A San Francisco, j’ai échangé avec un homme d’affaires intéressé pour commercialiser l’Omégachoco à Hong-Kong. Il y a goûté et a été séduit. » Pas sûr que les deux hommes fassent affaire. Maintenant, le nom de Jean-Claude Berton ne peut plus être ignoré. Un Monsieur chocolat à nul autre pareil. 

(*) « Le chocolat et le chirurgien », éditions du Rocher, 2013 ; « Comment se soigner avec le chocolat », éditions du Rocher, 2015.

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