Kevin Wheatcroft, l’encombrant voisin du Sud-Vienne

Considéré comme le plus grand collectionneur d’objets nazis au monde, Kevin Wheatcroft possède une résidence secondaire à Luchapt. L’une des plus grosses fortunes du Royaume-Uni y a aussi racheté une quinzaine de maisons. Dans ce petit village du Sud-Vienne, sa personnalité intrigue.

Arnault Varanne

Le7.info

Aux confins de la Vienne, de la Haute-Vienne et de la Charente, Luchapt est sans doute l’une des communes les plus « british » de Nouvelle-Aquitaine. Près d’un tiers des trois cent sept habitants sont des sujets de sa Majesté. Parmi eux, Kevin Wheatcroft, propriétaire du château Valentin, une imposante demeure bourgeoise en plein cœur du bourg, et d’une quinzaine de demeures dont la plupart ont les volets clos. Au grand dam du maire, Bertrand Renard. « Le fait qu’il y ait des maisons inoccupées (deux ont été louées, ndlr)dans le centre du village me chagrine car c’est un manque à gagner pour la commune. Il n’en fait rien. A un moment donné, il voulait racheter le terrain de foot, mais nous avons dit non. En revanche, je lui ai fourni plusieurs certificats de maisons vides. » 

« Un vague projet de musée »

A son arrivée, le fils du magnat de l’immobilier anglais avait « vaguement parlé d’un projet de musée ». Mais depuis, silence radio. Ce qui étonne chez Kevin Wheatcroft, c’est sa passion pour les objets du IIIe Reich.« L’homme qui dort dans le lit d’Hitler »(The Guardian, Daily Mail, 2015) possède l’une des plus grandes collections au monde liées au nazisme. Les journaux britanniques estiment sa valeur à plus de 100M£. Véhicules, uniformes, armes… Sa collection serait répartie entre sa demeure de Leicester, l’Allemagne et la France, où il possède plusieurs résidences en Moselle et donc à Luchapt. 

« Le crash d’un Spitfire »

Il y a quelques années, un jardinier français qui travaillait au château Valentin a assisté à une scène étonnante. « M. Wheatcroft nous avait demandé de creuser des tranchées pour reconstituer le crash d’un Spitfire (1).Au château Valentin, j’avais aussi aperçu un halftrack militaire allemand (tracteur à chenilles) et des Jeep Willys. » De là à dire que l’intrigant voisin projetait d’ouvrir un musée dédié à sa passion compulsive, il y a un pas que nous ne franchirons pas. 

N’empêche, à Luchapt, le culte du secret entretenu par M. Wheatcroft interpelle. Nadine(2)lui a vendu la maison familiale il y a deux ans. « Nous l’avons invité plusieurs fois à des repas de notre association, mais il n’est jamais venu », regrette-t-elle. Nous l’avons évidemment sollicité. Mais son intermédiaire en France Nicky Gait, qui gère son patrimoine immobilier, nous a opposé une fin de non-recevoir. Comme plusieurs de ses compatriotes et le journaliste Alex Preston, auteur des articles cités. Selon nos informations, l’homme d’affaires britannique a passé une dizaine de jours dans le Sud-Vienne, fin avril. La légende raconte que lorsque le drapeau aux armoiries de la famille flotte au vent, c’est que le patron est dans sa demeure. 

(1) Avion de l’armée de l’air anglaise, qui avait permis aux Anglais de gagner la bataille des airs lors de la Seconde Guerre mondiale face aux Messerschmitt de la Luftwaffe.

(2) Prénom d’emprunt. 

 

Objets nazis : quelle législation ? 
L’article R-645-1 du code pénal n’interdit pas la vente d’objets ayant appartenu à des dignitaires du IIIeReich, mais il en réglemente le port ou l’exhibition. Extraits : « Est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la 5e classe le fait, sauf pour les besoins d’un film, d’un spectacle ou d’une exposition comportant une évocation historique, de porter ou d’exhiber en public un uniforme, un insigne ou un emblème rappelant les uniformes, les insignes ou les emblèmes qui ont été portés ou exhibés par les membres d’une organisation déclarée criminelle. » Autrement dit, même s’il le souhaitait Kevin Wheatcroft ne pourrait pas ouvrir en France un musée dédié à sa passion. «Je veux que les gens voient ces choses. Je dois les rendre publiques. Il n'y a aucune meilleure façon de comprendre l'Histoire», disait-il à nos confrères du Steeple Times l'an dernier. Une page Facebook et un site sont dédiés à cette passion.  

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