Vive les mariés

Le Regard de la semaine est signé Delphine Roux.

Le7.info

Le7.info

Nous sommes le 23 mars 2021, c’est le printemps. Si la pandémie le permet, ce printemps va apporter avec lui son lot de cortèges et de noces… Le mariage est une prise d’otage réciproque actée légalement, bénie, applaudie et félicitée par la famille, les amis. Attendue même souvent par des proches bienveillants. Arrosés de riz, les jeunes mariés, plus tendus qu’heureux en cette journée, sourient benoîtement aux convives qui leurs crient des hourras, posent pour des photos que leurs enfants trouveront ringardes dans vingt ans et qu’ils rangeront dans des albums qu’ils n’ouvriront plus.

Hourra, hip-hip-hip, jeunes mariés ! Bienvenue dans votre prison sociale, familiale et psychologique. Nous sommes tellement heureux de votre malheur à venir. Rejoignez-nous dans la secte des aigris, insatisfaits et accros aux anxiolytiques. Jeune mariée, désigne la prochaine victime en lançant ton bouquet de roses sans épines, bouquet menteur au doux et suave parfum, qui par l’enivrement qu’il te procure te détourne de l’idée même des épines qui sont par nature sur les tiges que tu tiens.

S’en suit un syndrome de Stockholm mutuel où otage et geôlier développent une forme d’empathie, de contagion émotionnelle sur une période prolongée et selon des phénomènes subtils d’identification et de survie. Pour le meilleur et pour le pire. La cérémonie du mariage occidental est une mascarade, un sacrifice humain sur l’autel de la Tradition. Aztèques, Mayas, Toltèques et Vikings sacrifiaient des Hommes pour nourrir les dieux, les vénérer, les rembourser d’une dette. Les Huey Tzompantli, étagères de têtes des Aztèques, sont les ancêtres cousins des bans et registres de nos mairies et édifices religieux.

Si Dieu est mort comme le dit Nietzsche, à quoi bon garder ce rite barbare ? Qu’avons-nous encore à nous faire pardonner des dieux ou de la société ? L’idée même du couple n’est-elle pas une absurdité ? Ne faudrait-il pas davantage parler d’association qui offrirait soutien, aide, tendresse et amour véritable mais sans contrainte physique, spirituelle, professionnelle et sexuelle ? La jalousie, la méchanceté, la mauvaise foi sont les signes que l’association ne fonctionne pas, que quelque chose n’est pas entièrement partagé, accepté ou compris. A quoi bon appeler cela couple ? A quoi bon sceller cela par un contrat qui finira, une fois sur trois, une fois sur deux à Paris, par un divorce ? Mais je m’arrête là, car bien sûr depuis l’enfance on nous lit « ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants »… Et nous y croyons, nous en rêvons. Longue vie aux mariés !

CV express
Professeure de lettres-histoire pendant treize ans, personnel de direction en collège et lycée depuis 2015 dans l'académie de Poitiers. Directrice du collège EIB Monceau à Paris depuis août 2020. Chargée de communication de l’école de comédie musicale Broadway School, qui a ouvert en septembre. Mère de deux enfants de 11 et 13 ans. 

J'aime : l'art et la culture, les langues étrangères, le yoga, le running, les voyages, les chats et les framboises.

J'aime pas : le sexisme, le racisme, les embouteillages, les insomnies, les moustiques et les choux de Bruxelles. 

 

À lire aussi ...