Dans la Vienne, biodiversité cherche solutions

Les espaces naturels de la Vienne souffrent d’une sécheresse historique, avec un impact déjà visible sur la biodiversité. Alors que les épisodes de chaleur vont s’intensifier, comment ces réserves peuvent-elles s’en prémunir ?

Steve Henot

Le7.info

C’est l’histoire d’une réhabilitation qui a porté ses fruits. Lieu de haltes au printemps et à l’automne ou de plus longs séjours en hiver, le plan d’eau de Saint-Cyr a toujours attiré les oiseaux. En vue d’accueillir davantage d’espèces sur des périodes prolongées, la Ligue de protection des oiseaux (LPO) a créé en 2009 une réserve de 40 hectares, où se sont développés les milieux : prairies humides à mésophile, boisements alluviaux, réseau de haies… Cette gestion du site par la LPO a permis à un plus grand nombre d’espèces de s’y épanouir au fil des années : 214 aujourd’hui contre un peu plus de 130 dans les années 1980.


« La faune ne s’y trompe pas. Quand elle découvre un lieu judicieusement aménagé pour son accueil, elle stationne volontiers », se félicite Allain Bougrain-Dubourg, en visite la semaine dernière. Mais pour combien de temps encore ? Le président de la LPO a bien remarqué que l’arbre du climat planté à Saint-Cyr avait souffert des fortes chaleurs de l’été. Comme l’ensemble du milieu. 
« Ce qui est vrai aujourd’hui pour l’accueil de certaines espèces ne le sera peut-être plus demain... Actuellement, les zones humides ne sont pas rechargées comme on l’espère. Tous les oiseaux qui arrivent du Nord pour se réfugier n’ont pas de lieu d’accueil favorable. »


« Il va falloir des moyens décuplés »

A la réserve du Pinail, on mesure déjà les conséquences du réchauffement climatique sur la zone humide. « On a un assec historique sur certaines mares, indique Kévin Lelarge, son conservateur depuis 2017. La population des écrevisses à pattes blanches a été réduite de moitié, l’Azuré des mouillères n’a plus de plantes hôtes puisqu’elles n’ont fleuri qu’aux deux tiers, les insectes aquatiques meurent… » 
Et les prévisions ne sont pas pour rassurer sur les prochaines années. Alors, comment ces espaces naturels peuvent-il faire face ? « A notre échelle, ça reste limité, répond Kévin Lelarge. On veut décarboner, en arrêtant le recours au tracteur, à la tondeuse… Faire le pari du biologique plutôt que de l’électrique. » 
La réserve planche aussi sur une gestion de l’eau dite « à la parcelle », pour que l’eau de pluie puisse s’infiltrer là où elle tombe. Et ainsi préserver le stock de carbone de la zone humide.


Ce projet ne pourra voir le jour sans aide des établissements publics et des collectivités. Le nerf de la guerre. « Il y a les financements et la volonté politique », 
complète Guillaume Riou. Le vice-président de la Région en charge de la Transition écologique et énergétique renvoie à la feuille de route Néo Terra qui ambitionne, entre autres objectifs, de créer dix nouvelles réserves naturelles régionales d’ici 2030, en plus des neuf déjà existantes, dont Saint-Cyr. Ce classement permet de limiter les menaces et d’allouer des moyens à la préservation du patrimoine naturel. « Il va falloir des moyens décuplés, estime Kévin Lelarge. On est peut-être à un point de bascule. Ce qu’on fait aujourd’hui va déterminer la rapidité du réchauffement. L’enjeu est de montrer que les activités humaines en dépendent. » Les récents débats autour de la « guerre de l’eau » 
sont là pour nous le rappeler.

DR - Johan Tillet/LPO

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