
Aujourd'hui
Fine lame et féru d’Histoire
Président de l’association Les Lames du Foyer, à Poitiers, Matthew Bleusse s’est pris de passion pour les arts martiaux historiques européens (AMHE), avec toute la rigueur historique que cela requiert.
Les coups de cœur ne se commandent pas, que voulez-vous. Quand il a posé son regard sur cette imposante bâtisse avec vue plongeante sur la vallée, Sébastien Desplanques a su immédiatement qu’il vivrait là, à Verrue. « Lorsqu’on est arrivé, il a eu un grand sourire, juste en passant le portail », confie sa complice, Alice. La petite bourgade perdue dans le Mirebalais compte 364 habitants, et donc depuis quelques mois son « Docteur du cycle », expert ès vélo. Combien savent-ils que l’ancien corps de ferme retapé -les clapiers à lapins ont disparu- est la propriété d’un ex-champion du monde de cyclisme sur piste ?
Le Normand au parler franc et au regard intense reconnaît que « [son] palmarès » et son passé de mécanicien dans des équipes professionnelles l’ont « aidé » à faire son trou. Quatre ans chez FDJ-Suez, ça vous classe son homme, encore plus quand l’équipe engrange les victoires. « Il y a trois courses qui me plaisent et que je n’ai pas pu faire en tant que coureur : l’Amstel Gold Race, Liège-Bastonne-Liège et La Flèche wallonne. J’ai remporté les trois avec les filles. C’étaient des moments forts, encore plus quand Grace (Brown) a gagné Liège. J’étais dans la voiture, c’était incroyable ! »
Seulement voilà, partir plus de deux cents jours par an en France et à l’étranger nécessite des sacrifices familiaux que Sébastien n’était plus enclin à fournir après une décennie chez Arkéa, Saint-Michel-Auber et donc FDJ-Suez. D’autant que son épouse est elle-même assistante sportive pour Groupama-FDJ. Terminés les allers-retours entre la Normandie et la Vienne ! « On est chez nous maintenant, le village est super cool en plus... »
Le gamin d’Elbeuf rembobine les souvenirs, les plus marquants comme les moins glorieux. Dans la première catégorie, il y a cette victoire à... 4 ans sur le parking de l’usine Renault de Cléon, où bosse aujourd’hui son meilleur ami. Le pensionnaire du club du Bosc-Roger-en-Roumois enchaîne tel un stakhanoviste. « Je n’allais pas faire du vélo pour me promener. Il me fallait des challenges en permanence. » En minimes, il décroche trente succès en trente-deux courses dont les titres régionaux sur piste et sur route. En cadets, rebelote, avec un titre de vice-champion de France de course aux points. Le néo-Bleu dispute ses premiers championnats d’Europe en juniors. Et décroche un titre mondial sur l’épreuve de scratch en 2003. La consécration.
« A ce moment-là, j’aurais sans doute dû aller dans une grosse équipe, mais j’étais trop jeune dans ma tête et je n’avais pas envie de partir de chez moi. » Il quitte finalement la Seine- Maritime pour rallier l’Eure et une équipe de DN1, à Evreux. « Ça m’a rouvert les portes de l’équipe de France ! En qualif’ d’une compétition, j’ai même réussi à battre Mark Cavendish. » Pressenti pour faire les Jeux olympiques après la Coupe du monde de Manchester, Desplanques finit par... raccrocher le vélo. « J’ai pété un plomb et j’ai arrêté d’un coup. Il y a eu des prises de tête avec les entraîneurs... »
« Sanguin » et « impulsif », Sébastien n’a jamais regretté sa décision. « Continuer dans ces conditions, ça n’aurait pas été moi. Aujourd’hui, je peux me regarder dans une glace sans regret ni amertume », juge-t-il. Le vélo, il y est revenu par la mécanique, plus tard. Mais entretemps, le fils de mécanicien et d’ouvrière -« mes parents se sont saignés pour moi »-, seulement nanti d’un bac commerce, a pris le chemin de l’usine. A 23 ans.
Six mois à Autoliv « pour se remettre la tête à l’endroit », puis un contrat de pilote essayeur chez Renault, avant le retour « aux premières amours ». Sébastien Desplanques est doué de ses mains et en a fait profiter deux magasins, avant d’implanter son « cabinet », d’abord à Bec-Hellouin, puis à Verrue. Le docteur consulte à domicile et se déplace aussi, sur les marchés notamment. Une façon originale de « rendre service ». Dans son atelier, « pas de vélo à 12 000€ », seulement quelques VTT et des biclous de Monsieur et Madame Tout-le-monde à rafraîchir. Et aussi son Look jaune de champion du monde qui trône en majesté. Il aime son nouveau quotidien plus raccord avec ses envies de « fonder une famille ». Bien sûr, l’ancien champion du monde s’accorde encore quelques sorties sur route. En mode tranquille ? « Non, il ne connaît pas le mot balade ! Il faut toujours qu’il soit le premier à la pancarte », plaisante Alice. Fan de Virenque, de hockey et de vitesse -il a fini par revendre sa 650cc-, Sébastien Desplanques ne renie rien de son passé. Ni les coups de cœur encore moins les coups de gueule.
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