
Hier
« Les Départements ne servent à rien, il faut arrêter de payer ces gens (les élus, ndlr) à rien foutre ! » Ces propos de Philippe Brottier (*), tenus devant une assemblée de chefs d’entreprise, mardi à Chasseneuil, ont provoqué l’ire de Bruno Belin, en ouverture de la commission permanente du Département, ce matin. « En colère au nom des personnels », le patron du Conseil départemental exige « des excuses » du maire de Fontaine le Comte et délégué communautaire en charge du Développement économique. « On n'a pas le droit de tenir ce type de propos. Nous sommes une institution voulue par la loi et quand on est un homme de loi, on ne peut pas contester une institution voulue par la loi.» Bruno Belin aimerait qu’Alain Claeys lui-même, en sa qualité de président de la communauté d’agglo, s’associe à ces excuses publiques. Une fois n’est pas coutume, au nom des élus de gauche, Sandrine Martin a abondé dans le sens du président de l’exécutif départemental. Quelques minutes après cette prise de parole très tonique, Alain Claeys a fait dire par Isabelle Soulard qu’il n’avait « pas à s’excuser pour des propos qu’il n’a pas tenus ». Quant à Philippe Brottier, il a réagi en soirée, sous la forme d'une longue lettre que nous diffusons en intégralité.
"J'ai lu avec stupéfaction et une certaine tristesse les propos que l'on m'a prêtés. Je tenais particulièrement à remercier toutes celles et ceux qui, non présents au moment où je les ai exprimés, se sont empressés de donner un avis… Ce d'autant qu'ils ont tous mon numéro de téléphone. Dans le cas d'une réunion avec des acteurs économiques qui n'apprécient pas la langue de bois, il nous a été demandé des explications sur les réorganisations récentes que nous avons connu des strates géographiques : le regroupement des régions, le regroupement des intercommunalités, le transfert de certaines compétences que détenait le Département vers ces nouvelles collectivités.
Dans ce cadre, j'ai precise que j'étais heureux d'avoir pu connaître, pendant ce mandat enfin, ces changements tant attendus de rationalisation de nos collectivités, mais que je regrettais que la logique n'ait pas été poussée au bout en faisant disparaître cette vieille institution qui remonte à plusieurs siècles qu'est le Département et qui ne sert plus à rien (en tant que strate territoriale). C'est une position que je défends depuis longtemps et qui s'inscrit dans la logique de la réorganisation territoriale.
Nous avons trop de strates et d'évidence c'est celle-ci qui doit disparaître. À aucun moment, je n'ai dit que le personnel du Département ne faisait rien. Pour une simple et bonne raison, c'est que je ne le pense pas. Je considère simplement, comme beaucoup de citoyens et entre autres les entrepreneurs, mais pas qu'eux, que nos structures territoriales doivent se simplifier, se rationaliser et que l'on fasse des économies d'échelle. C'est ce que la loi NOTRe a mis en place, en enlevant aux Départements la compétence économique pour ne l'attribuer qu'aux régions et aux intercommunalités. Les Départements sont des structures qui ont vocation à disparaître et leurs services à être orientés sur des niveaux territoriaux plus pertinents.
Mais alors pourquoi cette suppression de la structure départementale ne se fait-elle pas ? Et c'est là que soit on a la langue de bois, soit on a un franc-parler. Si on regarde ce qui s'est passé avec les grandes Régions et les regroupements d'intercommunalités, cela a notamment conduit à limiter le nombre d'élus indemnisés sur une même échelle géographique. Et c'est là que le bât blesse. Si les Départements existent toujours, (...) c'est pour sauvegarder des postes d'élus. Cela n'enlève rien à la qualité des femmes et des hommes qui exercent ces fonctions. D'ailleurs, on constate un phénomène très significatif, c'est que l'on retrouve aujourd'hui les mêmes élus au niveau intercommunal et au niveau départemental. Ces élus n'ont pas besoin des deux structures pour exercer leurs fonctions. Donc, je le dis et le redis, la structure départementale a vocation à disparaître. De plus mes considérations ne sont bien évidemment pas d'ordre local mais national. On ne peut pas demander aux Françaises et Français de faire des efforts, des économies, demander aux entreprises d'être performantes et, en tant qu'élu, ne pas être capable de remettre en cause nos structures. Cela fait aussi partie de ce qui discrédite le monde politique aux yeux de la population. C'est avec grand plaisir que j'accepterais de réitérer mon point de vue devant l'assemblée départementale si je suis invité. Je tiens quant à moi, sans plus attendre, à excuser toutes celles et ceux qui m'ont fait des procès d'intention et leur réitère toute mon amitié."
(*) Confirmés par plusieurs sources.
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