Les garagistes sur le pont

Vous pensez que les factures de réparation automobile sont trop salées ? Et que le garagiste du coin a la main lourde avec la calculette ? Le moteur de votre irritation nécessite peut-être quelques réglages...

Nicolas Boursier

Le7.info

Le soleil printanier du dehors tranche avec le noir de leurs mains, les arômes de pelouse fraîchement coupée avec l'odeur du cambouis et des échappements vociférants. Ce décor est, depuis dix-huit ans, celui de Sébastien Jadeau. Patron de son état, artisan-garagiste de conviction.

En 2006, l'ancien employé a repris le garage des Dunes, entreprise de réparation multimarques ayant pignon sur rue dans le quartier Aboville. Des regrets ? Pas le moins du monde. "La profession a évolué, mais il y a du boulot pour tout le monde. Des fois même trop."

Au plus fort de la "tempête", Seb et ses quatre mécanos soumettent chaque jour à l'expertise une douzaine de véhicules. La chanson de geste est rodée, celle de la comptabilité aussi. "Vous voulez que je vous parle franchement ? Eh bien oui, j'ai souvent du mal à présenter la facture. Surtout quand je connais bien les clients." Sébastien Jadeau a beau vivre des petits et gros pépins mécaniques, il reconnait volontiers que les prix peuvent paraître exorbitants, qu'"un billet de 500 lâché pour continuer à rouler sûr fait mal à toutes les bourses". Et pourtant, il s'y colle. "Le garagiste est encore et toujours le docteur des voitures. Un type que l'on répugne à voir quand on a un problème mais qu'on est quand même obligé de consulter pour que ces problèmes-là ne s'aggravent pas."

Le professionnel l'affirme haut et fort, "ce qui pénalise des méteirs comme le nôtre, ce sont les charges et le coût des pièces". "Si nous voulons sortir une marge décente, poursuit-il, nous ne pouvons faire autrement que d'agir sur ce levier de la matière première. La main d'oeuvre, en revanche, n'a pas bougé depuis des années."

La formation en plus

Au relais de cet exemple, la CNPAA confirme l'évidence : en moyenne, la main d'oeuvre n'est facturée qu'à hauteur de 60 ou 65%. "Sur une recherche de panne de huit heures, la facturation tourne en moyenne autour de deux ou trois heures, confesse explique-t-elle. Un changement de bougie ou d'ampoule passe régulièrement à l'as. Cela, les clients doivent en avoir consience."  Ces mêmes clients ne savent sans doute pas non plus qu'au-delà de l'aspect purement interventionnel, l'activité artisanale essuie les foudres d'obligations incompressibles. Comme la formation continue des employés, contrainte par la législation du travail. "En dix ans, le principal poste d'évolution concerne l'électronique. Un "vieux" mécano doit vivre avec son temps et coller au plus près de ces changements technologiques, confie Sébastien Jadeau. Se former est incontournable. De la même façon, le CAP d'hier devient limité. Dans un avenir très proche, un jeune ne disposant pas d'un bac pro aura beaucoup de mal à trouver un boulot."

Quant à l'investissement dans l'équipement, il s'avère, là aussi, indispensable. "Un garage qui n'a pas de banc électronique, de nos jours, ne peut pas vivre, conclut le mécanicien. Cette exigence de qualité-là est un gage de sérieux et de sécurité. Mais pour le professionnel, il a un coût de plus en plus élevé." Dont le client, hélas, paie une partie à la caisse. CQFD.
 

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