2015, la belle utopie

Début mars, la sénatrice socialiste Claire-Lise Campion a rendu un rapport proposant au Premier ministre de reporter les mises aux normes d’accessibilité à 2022. À Poitiers, si l’aide au handicap est désormais dans tous les esprits, on estime aussi que l’objectif de 2015 est une utopie.

Romain Mudrak

Le7.info

Ses pavés blancs aveuglent les passants les jours de soleil et deviennent glissants lorsque la pluie s’en mêle. Certains jugent son esthétique « trop minérale »... On peut additionner tous les défauts de Coeur d’agglo, reste que ce gigantesque chantier de rénovation a rendu le centre-ville accessible aux handicapés.
Serait-ce l’arbre qui cache la forêt ? Oui... et non ! Depuis 2008, seize campagnes de réfection de la voirie ont été menées à Poitiers. Parmi les plus emblématiques, on retrouve les places de Provence et de Coïmbra aux Couronneries, les abords de l’église Sainte-Radegonde, le bas de la Grand’Rue ou encore la place des Templiers, à Beaulieu. Dans tous ces endroits fréquentés, les travaux ont permis d’éviter les marches inutiles, d’installer des bandes podotactiles, d’élargir les espaces piétons…

Entre priorités et compromis

Problème, tous ces aménagements coûtent cher : « Poitiers possède 220km de voirie et mon budget annuel de 12M€ comporte beaucoup d’autres volets », déplore Eliane Rousseau, adjointe au maire de Poitiers. Il faut donc faire des choix (lire encadré) et se résigner à avancer lentement.
Concernant les bâtiments ouverts au public, la philosophie est la même. La loi sur le handicap de février 2005 donnait dix ans aux collectivités et commerçants pour mettre aux normes d’accessibilité tous les lieux de passage. Et à Poitiers comme ailleurs, l’échéance apparaît désormais bien utopique. « Cette loi était extrêmement généreuse. Elle a ancré le handicap dans les esprits. Mais tout ne sera pas fait en 2015 », assure Abderrazak Halloumi, conseiller municipal délégué à l’Accessibilité. D’autant que les chantiers du musée Sainte-Croix et des Beaux-Arts seront particulièrement coûteux. Le diagnostic, réalisé en 2009, fixait le coût total des travaux à 20M€. Une somme difficile à réunir. La Mairie jongle ainsi entre priorités et compromis. Par exemple, en attendant que les étages de l’école Micromégas deviennent accessibles, les élèves handicapés de Saint-Eloi iront plutôt à Pablo- Neruda, qui est de plain-pied. Une question de bon sens. Finalement, les élus de tout bord pourraient être sauvés par le rapport de Claire-Lise Campion. Début mars, la sénatrice socialiste a préconisé au gouvernement de reporter les sanctions à… 2022. Tout en allégeant le poids des « normes parfois trop strictes ou ayant des incidences budgétaires trop fortes ». Une prise de position dénoncée, il y a quelques jours dans nos colonnes, par Philippe Croizon.

A retenir. Deux réunions publiques dédiées aux commerçants sont organisées le 10 juin, de 10h à 12h, à la maison de quartier de Saint-Eloi, et le 13 juin, de 19h à 21h, dans le centre-ville de Poitiers.
 

Voirie. Savoir choisir ses rues

On ne pouvait pas penser réaménager le centre-ville ou les deux extrémités du viaduc des Rocs sans les rendre accessibles aux personnes handicapées. Mais le choix des autres rues à rénover est beaucoup moins évident. En 2009, la Mairie a rassemblé ses priorités dans un Plan de mise en accessibilité de la voirie et des espaces publics (Pave). En outre, lorsqu’un concessionnaire (téléphonie, gaz, électricité…) désire creuser la voirie pour moderniser son réseau, une procédure complémentaire s’enclenche. Tous les autres acteurs sont mobilisés. Histoire de ne faire qu’un trou ! Ensuite, la municipalité en profite pour remettre au goût du jour la chaussée et les trottoirs. Ce sera le cas de la rue des Feuillants cette année. Jean-Jaurès et Grand’Rue attendront un peu…

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