
Aujourd'hui
Elle s’en souvient encore. Un vrai coup de foudre. Quand Agathe Gallo est entrée pour la première fois dans le studio de Pulsar, la radio associative et étudiante de Poitiers, elle a su. C’était en octobre 2020. Grâce à l’émission « 900 secondes », elle a fait ses premiers pas sur les ondes. « Je n’étais pas très bonne et hyper-stressée », s’amuse-t-elle. A 29 ans désormais, elle promène son micro et son sourire lumineux partout, à Poitiers et où ses envies la portent. Elle est libre Agathe. « Merci Véronique Gallo ! », lâche la jeune femme. Orpheline de père à l’âge de 7 ans, elle est la dernière d’une fratrie de trois enfants tous animés par une insatiable curiosité et une insolente volonté d’entreprendre. « Ma mère nous a toujours dit que le plus important était d’aimer ce qu’on faisait et elle nous a laissés libres de mettre notre énergie dans ce qui nous plaisait. » Le message est passé. « Mon frère s’est installé au Panama où il a fondé une académie de basket et ma sœur, après avoir fait le tour du monde, a créé un éco-lieu du côté de Toulouse (ndlr, Pass’rêve). » Agathe, elle, a fondé un média culturel, Quartier Libre, dans la ville où elle a grandi et qu’elle évoque avec les yeux qui brillent.
Le Caen de ses six premières années n’est qu’une mention sur des papiers officiels. Agathe est Poitevine jusqu’au bout des ongles. « J’ai eu envie de partir, beaucoup, et j’ai moi-même souvent dit que Poitiers était une ville pas dynamique, où il n’y avait rien à faire… Puis, en bossant dans le milieu de la culture, j’ai découvert un trésor inépuisable dont on ne parle pas assez. » Alors Agathe a choisi de rester pour être celle qui en parle, « pour rendre la ville attractive et douce à vivre ». « Au moment de monter Quartier Libre, j’ai réalisé qu’il était temps d’être fière d’être une jeune femme à Poitiers », assène-t-elle. Sa devise : « Avec Quartier Libre, vous ne pourrez plus dire qu’il n’y a rien à faire à Poitiers. »
« Au début, j’étais toute seule avec ma meilleure amie. Puis deux chroniqueurs bénévoles sont arrivés, puis trois… Aujourd’hui, ils sont vingt-trois. » La passion est communicative, et Agathe n’est pas du genre à s’arrêter en chemin. D’ailleurs, elle ne s’arrête jamais vraiment. « J’ai la bougeotte », avoue l’ancienne étudiante en licence de psychologie -« j’ai adoré »- qui a bifurqué vers un master en communication à l’IAE.
Lors de son master 2 effectué en alternance au Confort moderne, elle a découvert les friches culturelles et leur histoire, en a fait un mémoire avant de remiser cette nouvelle passion pour plus tard. Le temps de s’immerger dans la vie culturelle poitevine en tant que salariée du Confort moderne puis du Théâtre-auditorium, mais aussi bénévolement. Nage libre, le Poitiers Film Festival... « Etre bénévole est une façon d’être activiste pour la ville », assène-t-elle avec conviction.
La jeune Poitevine a de l’énergie à revendre, et elle la donne généreusement. Mais « j’avais besoin de plus. Alors je suis revenue à mon mémoire… J’avais aussi envie de podcast, ce nouveau médium qui s’approchait de la radio. » En autodidacte déterminée, Agathe a imaginé La Halte, un projet en forme de road trip à bord d’un camion aménagé « pour y dormir et pour y faire des émissions de radio ». De septembre 2022 à mai 2023, elle a relevé le défi qu’elle s’était elle-même lancé : trente villes, trente friches artistiques. « J’avais envie d’aller visiter ces lieux, de voir les personnes qui les faisaient vivre, ce qui fonctionnait ou pas, quelles étaient les politiques des villes à leur endroit… Je voulais faire une cartographie. »
Depuis son retour, elle est sur tous les fronts. D’audio, l’aventure Quartier Libre est devenue visuelle avec l’arrivée du vidéaste Antoine Dambras. Mais le modèle économique tarde à s’affirmer alors Agathe multiplie les prestations, l’éducation aux médias pour des publics de 7 à 77 ans, les commandes de podcasts… Elle est aussi de l’aventure de Flûte, le nouvel agenda culturel poitevin. Pourtant patiente, elle s’impatiente. Elle rêve d’un vrai studio pour Quartier Libre, loin de son salon qui accueille les interviews, sert de salle de montage… « Je suis partout parce que j’ai envie de faire perdurer Quartier Libre, je suis persuadée que ce média a du sens sur Poitiers. Si je devais demander de l’argent aux personnes qui nous suivent, je serais un peu déçue. Ce que j’aime dans la radio, les podcasts et les réseaux, c’est précisément qu’ils sont accessibles. » Une petite subvention publique serait la bienvenue… En attendant, Agathe déploie toute son énergie pour « donner la parole à ceux que l’on n’entend pas, pour visibiliser les invisibilisés ». Le combo télé-canapé, ce n’est pas son truc. Il faut que ça bouge -concerts, spectacles, elle n’est jamais rassasiée-, que ça danse -depuis toujours -, que ça crée - pâte Fimo ou aquarelle qu’importe- et que ça voyage aussi, pour toujours mieux revenir à Poitiers, sa ville.
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