Les bailleurs sociaux dans le dur

La conjoncture affecte de plein fouet les bailleurs sociaux de la Vienne, touchés par la hausse du prix des matières et le relèvement du taux du livret A, l’une de leurs sources de financement sur des programmes de construction.

Arnault Varanne

Le7.info

A Montamisé, le futur quartier du Jeu s’enrichira bientôt de seize nouveaux logements « signés » Ekidom et destinés aux seniors. Le coup d’envoi des travaux a été donné mercredi dernier, avec tous les partenaires. L’aboutissement d’une longue réflexion, avec une part d’autofinancement 
« plus importante que sur d’autres programmes », 
reconnaît Elisabeth Naveau-
Diop, présidente d’Ekidom. De fait, l’organisme finance sur ses fonds propres près de 
800 000€ sur 2,6M€. L’exception ne pourra pas devenir la règle. 
« En général, on est sur 15 à 20% maximum », embraie Stéphanie Bonnet. En année normale, Ekidom construit environ 80 nouveaux logements. Mais un programme de 20 logements vient d’être ajourné, tandis qu’un autre (4) est purement et simplement annulé.

La hausse du prix des matières premières pénalise les bailleurs sociaux. « Sur le programme de 20 logements en question, nous étions à +18% par rapport à l’enveloppe prévue et encore deux lots n’étaient pas attribués... On verra début 2023 si la situation a changé », soupire la directrice d’Ekidom. A la flambée des coûts de construction s’ajoute le relèvement du taux du livret A, passé de 0,5% à 2% en quelques mois, et annoncé à 3% en février 2023. Or, c’est l’argent des épargnants qui permet aux bailleurs sociaux de financer leurs nouveaux programmes immobiliers. Des taux d’intérêts plus élevés sont donc un mauvais signal. « A chaque fois que le livret A augmente de 0,5 point, c’est 1M€ de charges financières supplémentaires », détaille Stéphanie Bonnet.

La RLS en cause

Chez Habitat de la Vienne, on dresse le même constat pessimiste. Le bailleur social a maintenu un rythme de construction équivalent à 2021, soit 150 logements. Pourra-t-il soutenir cet effort ? « Quand vous ajoutez l’empilement des normes énergétiques, les coûts des matériaux et le livret A, vous arrivez à une situation où le prix d’un logement a doublé par rapport à il y a dix ans », calcule Pascal Aveline, le directeur général. Et le problème, c’est que ni Habitat de la Vienne ni les gestionnaires d’établissements sociaux ou médico-sociaux ne peuvent répercuter ces hausses sur le prix des loyers, ou à la marge seulement. 
« Nous allons différer certaines opérations, reprend Pascal Aveline. L’idée n’est pas de mettre l’organisme en danger en apportant toujours plus de fonds propres. Il faut s’attendre à une année 2023 très compliquée. »

Un autre « phénomène » grève structurellement les budgets des bailleurs sociaux : la réduction du loyer de solidarité, mise en œuvre lors du premier quinquennat Macron. « Entre 2018 et 2022, c’est 10M€ de moins chez Habitat de la Vienne. » Pour Ekidom, « on est sur 4M€ par an, sachant que 56% de nos locataires touchent les Aides personnalisées au logement », commente Stéphanie Bonnet. Dans ces conditions, l’objectif des 250 000 nouveaux logements neufs par an du gouvernement a du plomb dans l’aile. Et les entreprises du bâtiment pourraient bientôt pâtir de la situation.

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