Insultes, menaces... Quand les gens dérapent

Victime d’une recrudescence du nombre d’agressions, le bailleur social Habitat de la Vienne a décidé de frapper fort en fermant temporairement sa permanence des Couronneries. Sa campagne de sensibilisation délie les langues.

Charlotte Cresson

Le7.info

« Sale chienne », « Taré », « Je 
te retrouverai ». Les mots choquent et sont authentiques. En seulement quelques jours, la campagne de sensibilisation aux agressions d’Habitat de la Vienne a été vue plus de 75 000 fois, suscité 2 000 réactions et engendré près de 300 republications sur le réseau LinkedIn. Le constat est clair, « c’est une réalité partagée », déplore Pascal Aveline, directeur général du bailleur social poitevin. Menaces, injures et violences font en effet désormais partie du quotidien de nombreux professionnels en contact avec le grand public. En diffusant cette campagne et en fermant temporairement son agence des Couronneries après une nouvelle agression survenue le 12 septembre dernier, Habitat de la Vienne met en évidence « un climat dégradé » 
et des conditions de travail de plus en plus difficiles. « On se réjouit des répercussions que la campagne de sensibilisation a pu avoir. Nous avons reçu des témoignages dont celui d’une personne menacée de mort par un locataire, qui nous remercie de mettre ces problématiques en avant. L’entreprise pour laquelle elle travaille lui demande de ne pas en parler pour ne pas faire de vagues. »


« Les gens perdent vite le contrôle »

Agents d’accueil, gardiens, ouvriers mais aussi travailleurs sociaux ou bibliothécaires... Les métiers diffèrent mais le rapport au public les expose tous à des violences en constante augmentation. Avec « 24 agressions pour 27 victimes en 2024 contre 9 en 2023 », les employés du bailleur social de Grand Poitiers Ekidom constatent, eux aussi, un climat de tension. « Des locataires s’en sont pris à du mobilier, un ouvrier a été enfermé car il ne voulait pas faire de travaux supplémentaires. Un agent a aussi été poussé par quelqu’un qui ne voulait pas attendre pour prendre l’ascenseur », 
détaille Séverine Roy, directrice des ressources humaines. 
« Les gens perdent vite le contrôle », constate Pascal Aveline, d’Habitat de la Vienne. Si la colère de certains allocataires s’entend, rien ne justifie les violences verbales et physiques. 
« Nous recevons beaucoup de demandes pour un parc assez restreint. Les gens ont l’impression que nous ne voulons pas leur donner de logements. » 
« Ils nous reprochent des questions sans réponse, de longs délais de travaux », confie Séverine Roy. Pour Zacharie(*), travailleur social à Poitiers, « ce qui génère le plus d’agressivité dans [sa] profession, c’est la mauvaise information ». Mais face à cela, « on passe moins par des voies de droit pour rentrer dans une voie d’agressivité verbale ou physique », constate Aurélien Luzi, directeur territorial d'Ekidom. 


Un monde du travail adapté

Tous insistent néanmoins sur un point : « Cela reste une minorité, dans 99% des cas ça se passe bien. Il ne faut pas stigmatiser. » Pour « soulager psychologiquement les agents », 
Habitat de la Vienne envisage d’installer un système de vidéosurveillance dans une première agence et de sécuriser les portes d’accès aux bureaux par un sas. L’organisme propose également une « formation gestion du conflit et self-défense chaque année ». « C’est malheureux », admet Pascal Aveline. 


(*)Prénom d’emprunt.

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