Les fonderies en mal d'avenir

Entre le plan de relance du secteur automobile et le plan d’économies de Renault, les salariés des fonderies aluminium et fonte d’Ingrandes-sur-Vienne sont dans l’incertitude, sur fond de baisse des commandes vertigineuse.

Claire Brugier

Le7.info

Le plan de relance du secteur automobile dévoilé par le Président de la République mardi dernier (8Mds€) fait état d’une subvention de 200M€ pour les équipementiers et sous-traitants automobiles et d’un fonds d’in- vestissement de 600M€ abondé à 400M€ par l’Etat et à 100M€ par Renault et PSA. Tous ces zéros posés sur la table ne rassurent pas pour autant les salariés des fonderies aluminium (285) et fonte (315) d’Ingrandes-sur-Vienne, qui produisent respectivement des culasses et des carters. L’annonce par Renault, vendredi dernier, de la suppression de 15 000 emplois dans le monde, dont 4 600 en France, et la menace qui pèse sur la Fonderie de Bretagne, à Caudan, font tristement écho à la baisse des commandes dans les deux usines. Le constructeur automobile est l’unique donneur d’ordres de la fonderie aluminium et le principal (60%) de la fonte.
Lors de la reprise des deux entreprises, en mai 2019, le groupe Liberty House s’était engagé à investir dans la diversification, tandis que Renault assurerait pendant trois ans des volumes. Mais l’inertie de Liberty, via ses branches aluminium (Alvance Aluminium Group) et fonte (Liberty Casts Products), pose question aux salariés. « Nos plans d’investissements sont toujours d’actualité, assure le groupe, mais notre priorité immédiate est vraiment de soutenir tous nos sites. Nous continuons à travailler avec notre client pour déterminer quels volumes contractuels supplémentaires peuvent être garantis. »

Commandes en baisse

Dans la Vienne, la production a repris le 27 avril pour s’arrê- ter le 16 mai. Les périodes de chômage partiel se succèdent, conditionnées par des volumes toujours en deçà des prévisions. Côté aluminium, la production redémarre ce mardi. Les 30 000 culasses programmées en mai ont fondu à 13 000 et, « en juin, la direction nous a finalement annoncé 27 000 pièces au lieu des 34 000 prévues », note Jean-Philippe Juin. Insuffisant pour le délégué CGT. Il craint une nouvelle « cessation de paiement ». La direction, qui n’a pas souhaité s’exprimer, aurait sollicité un prêt garanti par l’Etat. Elle a également frappé à la porte de la Région pour obtenir les 5M€ nécessaires au développement d’une nouvelle culasse, la HR10.
« Nous avons déjà donné 2,9M€ dans le cadre des investissements précédents, antérieurs à la reprise. La Région est partante pour faire effet levier, mais elle ne veut pas être seule », souligne Francis Wilsius, conseiller régional en charge de la Restructuration économique. C’est Renault qui a la clef de la relance de ses sous-traitants. »
Côté fonte, la reprise a été reportée à mardi prochain. « On nous avait dit que l’on reprendrait le 2 juin avec la production de 17 000 pièces, ce sera 14 000 pièces. Il y aura encore du chômage partiel à la fin du mois ! », prédit Thierry Waye, délégué CGT. Le virage électrique promu par le chef de l’Etat ne plaide pas en faveur des sous-traitants de la motorisation thermique, déjà fragilisés par la crise du diesel. « Cela va finir de nous enterrer. Nous sommes une entreprise sous perfusion. »
D’un côté comme de l’autre, les délégués du personnel viennent une nouvelle fois, par courrier, d’interpeller la secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Economie et des Finances. Agnès Pannier-Runacher est déjà venue à leur rencontre le 8 mars et le 26 avril 2019. Avant la reprise par Liberty House.

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