Cet été, une proposition de loi visant à imposer un contrôle médical aux conducteurs de plus de 75 ans a suscité le débat, avant d’être rejetée. Les professionnels de santé et de la conduite appellent à mieux accompagner les personnes âgées.
« Hors de question de faire de l’âgisme », assène d’emblée Marc Paccalin, médecin gériatre au CHU de Poitiers. En juillet dernier, le député MoDem Bruno Millienne (Yvelines) a déposé une proposition de loi pour instaurer une visite médicale obligatoire aux conducteurs de plus de 75 ans, pouvant aboutir à une suspension du permis. Elle a été rejetée début octobre, le gouvernement indiquant n’être « pas favorable » à un tel examen. « On ne va pas imposer à un diabétique de contrôler sa glycémie avant de conduire, poursuit, à titre de comparaison, le gériatre. La voiture est d’autant plus essentielle aux seniors en milieu rural, pour aller à un rendez-vous médical, faire ses courses ou voir un proche. » Les stéréotypes ont parfois la vie dure. Dans les faits, les personnes âgées ne sont pas plus impliquées dans des accidents de la route que le reste de la population. Elles sont en revanche plus vulnérables, les plus de 75 ans représentant 15% des décès, juste derrière les 18-24 ans (17%).
Des remédiations à la conduite
Pour rassurer leurs bénéficiaires ou leurs adhérents, les associations et les mutuelles proposent régulièrement des ateliers de remédiation. La semaine dernière, 130 seniors ont participé à un forum « sécurité routière » organisé par la Mutualité sociale agricole, à Saint-Martin-la-Pallu. « Je suis intervenue sur les problèmes de vision, indique Sophie Richer, opticienne à domicile. Il y a aussi eu du théâtre interactif. Les acteurs mettaient bien en avant certains défauts de conduite. C’est un sujet très concernant. »
Au fait des conséquences du vieillissement sur les conducteurs, les auto-écoles se saisissent aussi de la question. « Nous avons eu la visite d’un homme de plus de 75 ans inquiet, indique une responsable chez ECF Poitou-Charentes, qui propose une « formation seniors » d’une journée. Il devait changer de voiture, il a préféré tester ses capacités avant d’acheter. » La formation comprend une réactualisation des connaissances, des recommandations et des informations sur les effets du vieillissement. « On conseille de faire des trajets de jour, plus courts, sur des itinéraires connus. L’objectif est de rester le plus longtemps autonome. »
Le rôle de l’entourage
Quant à un examen médical obligatoire, la monitrice n’est pas convaincue. « Qu’est-ce qu’on met en place derrière ? Sur quels critères se ferait un retrait de permis ? » Comme elle, Marc Paccalin rappelle l’importance du rôle des généralistes dans la prévention autour des prises de médicaments -notamment le respect du pictogramme rouge : ne pas conduire- et la détection des signes de déclin cognitif. En ce sens, la Société française de gériatrie et de gérontologie, avec plusieurs partenaires, a publié en août des recommandations pour la conduite des personnes atteintes d’Alzheimer (ou suspicion). « Beaucoup craignent l’arrêt partiel ou total de la conduite, remarque Marc Paccalin. Seul le médecin agréé de la préfecture peut demander la suspension du permis. Les généralistes, les autoécoles ou autres professionnels ne peuvent que conseiller, d’où l’importance de l’entourage pour soutenir leurs proches dans ces transitions parfois difficiles. »