Geneviève Darrieussecq : « On ne peut s’identifier à une Région que si on la connaît »

A quelques jours des élections régionales, Le 7 donne la parole aux huit têtes de liste. Premier volet avec la candidate LREM-Modem, par ailleurs ministre déléguée en charge de la Mémoire et des Anciens combattants, Geneviève Darrieussecq (L’Union fait la Région).

Steve Henot

Le7.info

Quelle serait votre première mesure si vous étiez élue à la tête de la Région ?
« J’aurais une attention au monde économique, qui repart mais peut être en difficulté. Notre rôle, c’est de mettre en œuvre le plan de relance, de continuer à protéger l’économie et de mettre un fonds d’urgence sur la table, si nécessaire, pour aider des entreprises à passer le cap de cette année. Ensuite, quand on arrive après le très long mandat des personnes qui vous ont précédé, je pense qu’il faut faire un audit financier. Pas que j’ai peur du mauvais état des finances de la Région, mais il y a surtout des inscriptions budgétaires sur du long terme que nous souhaiterions revoir, parce que nous avons des ambitions pour mettre en œuvre notre projet. Un exemple :  le président sortant est parti dans la réalisation de la voie ferrée Pau-Canfranc, ce n’est pas une priorité pour nous. Ce seront donc des sommes qui seront dégagées pour faire autre chose. Aussi, je souhaite faire une évaluation des dispositifs, notamment en formation. La formation professionnelle représente 330M€ par an, ce n’est pas rien pour la Région. Je souhaite que nous ayons une évaluation la plus exacte possible de la pertinence de cette formation pour, là aussi, garder ce qui va bien et rediriger ce qui doit l’être. »

Qu’est-ce qui vous sépare ou vous rapproche, fondamentalement, du président sortant ?
« Nous pourrions avoir des projets qui nous rapprochent. Par exemple, il a longtemps porté la poursuite de la ligne à grande vitesse, en-dessous de Bordeaux. Il en a même fait son cheval de bataille aux élections de 2015 au premier tour, pour ensuite s’allier avec les Verts, l’abandonner au second tour, ne plus en parler et ne rien faire pendant six ans… Ce que je reproche à Alain Rousset, c’est qu’il y a des politiques d’aménagement du territoire qu’il n’a pas menées alors qu’elles sont essentielles et devraient être mises au premier plan des politiques de la Région : le train, les routes, le numérique où nous sommes très en retard, l’économie, la santé, l’accès aux médecins traitants… J’en fais un axe majeur, Alain Rousset ne l’a jamais fait. Depuis qu’il est président, il y a une métropolisation des activités dans l’ancienne Aquitaine, plus qu’un développement harmonieux des territoires. Et il a des alliances politiques un peu baroques qui, je pense, l’entravent. Quand on est dans une majorité, il vaut mieux être d’accord sur des valeurs, certes, mais également sur un projet et sur la façon d’avancer. Nous ne nions pas l’écologie et son importance, mais nous souhaitons une écologie de progrès et de solution plutôt que d’injonction. Alain Rousset a eu beaucoup de mal à la construire avec ses partenaires. Dans la philosophie et dans la gouvernance, je ne suis pas du tout en accord avec lui, qui est en plus rempli de certitudes, persuadé qu’il a tout le temps raison et qu’il a tout fait. »

Les compétences du Conseil régional sont assez peu connues des habitants. Comment serait-il possible de mieux les faire connaître ?
« Je suis très humble sur la communication. Il faut dire aux gens que ça concerne leur vie de tous les jours. Quand ils prennent un train ou un bus, c’est la Région. Quand ils envoient leurs enfants au lycée, c’est la Région. Quand ils souhaitent faire une formation professionnelle pour changer de métier ou évoluer, c’est la Région. Ce n’est pas la Région qui crée des emplois, ce sont les entreprises. Je connais le sujet… Non, parce que le président sortant dit sans arrêt que c’est grâce à lui que des emplois sont créés partout. La Région a un effet de levier et c’est important, mais elle est là pour l’emploi, la formation, la jeunesse, la mobilité, les déplacements… Rien que ces sujets sont moteurs dans la vie de tout le monde. (…) On peut les faire connaître avec plus de proximité. La gouvernance d’Alain Rousset est très centralisée, avec peu de concertation territoriale, pas de co-construction. Même le Ceser (Conseil économique, social et environnemental régional) le dit. Je pense que dans chaque département, il faut que nous remettions la Région. Physiquement avec un lieu -comme une Maison de la Région- mais aussi avec des ressources humaines et les élus des territoires. »

Quelles compétences souhaiteriez-vous décentraliser ?
« Avec la loi 4D qui va être votée -je l’espère bientôt- avec le Parlement, nous allons pouvoir donner des bouts de compétences aux Départements et aux intercommunalités. Je ne suis pas du tout opposée à cela, bien au contraire. Ce sera déterminé avec eux selon la façon dont les choses pourront être portées. Il y a des pans de soutien direct à certaines économies qui sont très locales, pourquoi ce ne serait pas ces collectivités qui pourraient en être chargées ? Comme on va pouvoir évoluer de ce cadre très fermé qu’est la loi NOTRe, on va pouvoir de la différenciation, ne pas traiter de la même façon tous les territoires et toutes les situations. Cela nous laisse une liberté et des possibilités que je suis prête à examiner avec chacun. »

Au-delà de la décentralisation, qu’est-ce qui pourrait fédérer cette Région, rassembler tous les territoires autour d’une identité régionale ? Un événement culturel ? Ou sportif ?
« Il y a le rugby, avec beaucoup de clubs des anciennes régions -La Rochelle ou Brive-, qui peut être un fil rouge intéressant. Un grand événement culturel, pourquoi pas. Je ne suis pas du tout opposée à étudier ce genre d’initiatives. Mais je pense que l’on peut commencer à s’identifier à une Région qui si on la connaît. Et comment mieux la connaître que par le tourisme, quand on est en week-end ou en vacances ? Je voudrais favoriser le tourisme intra-régional. Cela peut être, par exemple, un soutien financier pour les néo-Aquitains qui partent en vacances dans la Région. C’est un levier incitatif parmi d’autres. » 

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