Derrière les murs - Permission de sortie 
vers le droit chemin

Que se passe-t-il après l’incarcération ? La rédaction décrit le quotidien des détenus du centre pénitentiaire de Vivonne, qui se reconstruisent une vie derrière les murs. En mai, quelques-uns ont pu bénéficier d’une permission de sortie pour participer à des activités autour de la nature. Comme une renaissance avant la levée d’écrou.

Romain Mudrak

Le7.info

C’est le genre de rencontre qui marque une vie. Le 20 mai dernier, à l’occasion de la 
15e édition de la Fête de la nature, quatre personnes détenues ont obtenu une permission de sortie pour participer à une journée forte en échanges et en découvertes. Direction Marçay, à 10km du centre pénitentiaire. Le groupe parti à vélo était accompagné d’un surveillant et de l’éducatrice sportive de l’établissement. Aucun risque d’évasion, tous étaient si près de la libération qu’il aurait été idiot de tenter quoi que ce soit. Au-delà, une relation de confiance s’est nouée. Ces détenus ont décidé d’aller vers « le droit chemin ».

« Un test
 pour nous tous »

Rendez-vous chez Thomas. Depuis trois ans, ce maraîcher fait pousser une soixantaine de légumes différents et 250 arbres, sur un grand terrain situé juste à côté de l’abbaye de Bonnevaux. Pendant trois heures, le jeune homme explique son métier, comme Stéphane, chevrier et producteur de fromages en biodynamie à quelques kilomètres de là, l’avait fait plus tôt dans la matinée. Une véritable relation chaleureuse se crée. Les réactions sont enthousiastes. « Voir tout ce qu’ils font pour gagner si peu, ça fait réfléchir, confie Toufik, qui rêve d’ouvrir son propre restaurant. Mais tous les deux ne veulent pas plus, il y a des choses plus importantes que l’argent. C’est un vrai retour à la réalité. A la sortie, je vais repenser à eux. » Pour Daniel, dont c’est la première sortie depuis longtemps, cette rencontre avec ses hôtes du jour représente beaucoup : « Ils nous tendent la main, ça montre qu’il y a une place pour nous. »

Les permissions de sortie constituent une étape primordiale pour préparer la levée d’écrou des détenus de longue peine. « C’est un test pour nous tous », reprend Daniel. Ce projet, coordonné par le SPIP (lire ci-contre) depuis plusieurs années, a suscité quelques dizaines de candidatures pour seulement quatre places. Ils ont été sélectionnés sur leur bon comportement et leur investissement personnel en prison. Une façon de leur signifier qu’ils ont droit à une seconde chance. C’est le message que souhaite renvoyer Thomas, le maraîcher : « Tous les gens qui nous entourent ne nous veulent pas forcément du mal. C’est une façon de voir le monde. » De cette « expérience extraordinaire », il a tiré quelques lignestrès touchantes postées sur sa page Facebook « La graine de ferme ». Son rôle ? « Partager un peu de cette beauté du monde que je cultive et mettre un peu de lumière au fond des yeux de ceux qui en ont le plus besoin. »

La journée s’est terminée avec Marie, animatrice nature au CPIE de Lathus. Les détenus ont également observé les paysages alentours qu’ils n’avaient pas vus, pour certains, depuis dix ans. Comme des enfants, les sens en éveil, ils ont touché, senti, dessiné des plantes aux mille vertus. Avant de repartir à vélo vers le centre de détention, conscients que ce qui les attend dehors mérite respect et attention.

ACTIVITÉS
« L’insertion passe aussi par la culture »
« Derrière les murs » s’achève avec cet épisode sur les permis-sions de sortie. Cette action a été mise en œuvre par le Service pénitentiaire d’insertion et de probation (Spip) qui dispose d’un budget et d’un poste dédiés. « Mon rôle consiste à créer une offre culturelle et artistique comme une maison de quartier le fait à l’extérieur, explique Mélanie Forestier, la coordinatrice sociocul-turelle du Spip. L’insertion passe aussi par la culture qui a vocation à ouvrir les esprits sur le monde et les autres. » Peinture, musique, théâtre, cuisine, bien-être... Hors crise sanitaire, de nombreux intervenants se rendent au centre pénitentiaire de Poitiers-Vivonne.

ASSOCIATION
Aire accueille les familles
Chaque jour, de nouvelles familles de détenus sont reçues par l’asso-ciation Aire au sein de la maison d’accueil située juste en face du centre pénitentiaire. Vingt-huit bénévoles s’y relaient du mardi au samedi pour les informer, les orienter et les écouter. « C’est très important d’être présent à ce moment-là, surtout pour décons- truire leurs représentations de la prison et les aider à expliquer la situation aux enfants », souligne Marion, l’assistante sociale d’Aire. Cette professionnelle accompagne les proches dans toutes les démarches administratives incontournables comme le permis de visite. Sachez que l’association recherche des bénévoles. Pour connaître toutes ses activités et obtenir des renseignements: airepoitiersvivonne.fr ou 05 49 44 19 45.

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