Aujourd'hui
Le groupe de rap NTM a construit sa légende sur un nom sulfureux et, aussi, sur ce qu’il dit de la banlieue au début des années 90. Suprêmes, le dernier long-métrage d’Audrey Estrougo, raconte sa genèse. Scolaire mais terriblement efficace.
Tous deux vivent en banlieue, à Saint-Denis dans le « 9-3 ». L’un travaille au côté de son père, menuisier dans le BTP, sans passion, faute de mieux ; l’autre, rejeté par un paternel violent, erre dans la rue, la violence et les drogues. Sans d’autre horizon que les barres d’immeubles de leur quartier, entre deux contrôles policiers, Bruno et Didier n’ont trouvé que le rap pour échappatoire. Mais ce qui ne devait être, pour eux, qu’un « one shot », un défi, se transforme très vite en authentique groupe de rap. Un groupe au nom sulfureux, percutant, qui se fait soudain porte-parole d’une jeunesse délaissée, méprisée…
En consacrant son dernier long-métrage à Suprême NTM, la réalisatrice Audrey Estrougo souhaitait, dit-elle, montrer « le versant social et politique de l’histoire du rap » en France. Il y a bien quelques scènes et images d’archives pour l’évoquer, mais on reste bien souvent à l’état d’illustration, comme par retenue (ou prudence ?), au profit d’un biopic pur et dur. Les débuts « coup de poing » -littéralement- dans les « MJC », les premiers échecs puis l’ascension, fulgurante, qui voit les divergences poindre au sein de la formation… Adoubé par Kool Shen et Joey Starr, Suprêmes retrace sans complaisance les premières années de NTM, de 1989 à 1992. Sans oublier la toute première scène extra-parisienne du groupe, en 1990, face à l’exigeant public du… Confort moderne, à Poitiers ! Un peu trop scolaire, le film compense par son énergie et sa passion pour son sujet. A ce titre, les deux acteurs qui incarnent le duo de rappeurs sont brillants de mimétisme, tant sur le plan vocal que dans la gestuelle, et ajoutent à l’exercice une intensité franchement emballante. A la hauteur du mythe, tout simplement.
Biopic d’Audrey Estrougo, avec Théo Christine, Sandor Funtek, Félix Lefebvre (1h52).
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