Crispation autour 
des arrêts de travail

Les médecins généralistes accordent-ils trop d’arrêts maladie dans la Vienne ? Alors que l’Assurance Maladie veut serrer les cordons de la bourse, les professionnels plaident la bonne foi et pointent, à l’instar des syndicats de salariés, l’état de santé psychologique de leurs patients.

Le7.info

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Comme dans de très nombreux départements, les dépenses de santé liées aux arrêts de travail augmentent dans la Vienne : 
+4,7% entre les premiers semestres 2022 et 2023, soit 41M€ contre 39M€, hors Covid. Conformément aux directives nationales, la Caisse primaire d’assurance maladie bat le rappel auprès des salariés arrêtés, des entreprises et des généralistes. 
« Nous ne sommes pas dans le contrôle systématique, plutôt dans l’accompagnement », note au passage la directrice, Sylvie Landrieau. Des « échanges confraternels » à la « mise sous contrat préalable » (cf. encadré), un arsenal de mesures est déployé pour réduire la « facture » 
des indemnités journalières, même si la CPAM assure n’avoir 
« pas d’objectif chiffré ».

« Santé psychologique précaire »

Une chasse aux sorcières malvenue ? Certains médecins le pensent, dont Philippe Bouchant. « En trente-trois ans d’exercice, je n’ai jamais vu la population dans un état de santé psychologique aussi précaire, témoigne le généraliste, représentant du syndicat des médecins libéraux. Et forcément, la durée des arrêts est plus longue... » Selon le Baromètre Santé Malakoff-Humanis 2023, les troubles psychiques arrivent dorénavant en deuxième position dans les motifs d’arrêt maladie, devant les troubles musculosquelettiques. Et les jeunes ne sont pas épargnés (52% ont au moins eu recours à un arrêt maladie dans l'année). « Nous sommes de plus en plus sollicités par nos collègues médecins, eux-mêmes de plus en plus sollicités par des employeurs en difficulté et des salariés en souffrance au travail », 
assure Clément Grignoux, psychologue de l’Association du service de santé au travail (ASSTV). Un deuxième psychologue l’a d’ailleurs rejoint en juillet 2023, signe que les besoins sont immenses.


« Stress au travail »

Au Medef et à la CPME, on ne constate pas de flambée de l’absentéisme, même si le délégué général du Medef reconnaît que « la santé et le bien-être des salariés est un vrai sujet », au même niveau que le recrutement. Son homologue de la CPME perçoit un « petit phénomène » autour des inaptitudes aux postes. Pour Christophe Rabussier, en revanche, la tendance est nette. « On observe une explosion des troubles psychiques, parfois jusqu’au burn-out, qui provoquent des arrêts maladie extrêmement longs. Beaucoup de salariés souffrent de stress au travail », ajoute le secrétaire général de la CFDT 86, qui milite pour davantage de prévention et la formation des managers. Sans surprise, la... santé figure au premier rang des secteurs les plus touchés. Le dispositif 
« Mon soutien psy » mis en place par la CPAM semble en l’espèce un pansement sur une jambe de bois. Le gouvernement s’est fixé 250M€ d’économies sur le budget de l’Assurance Maladie en 2024.
 

Sept médecins encadrés 
La campagne actuelle de la CPAM de la Vienne au sujet des arrêts de travail a conduit l’organisme à s’intéresser à huit médecins pour lesquels il a « des interrogations sur la volumétrie des prescriptions ». L’un d'eux, qui s’arrête en fin d’année, n’aura pas de suivi. Six autres bénéficient d’un « contrat d’objectif » entre septembre et février 2024. En clair, ils devront « faire évoluer leurs pratiques », dixit Sylvie Landrieau. Un médecin a été mis « sous accord préalable », autrement dit chaque arrêt de travail prescrit par ses soins sera examiné par le médecin conseil. Dans tous les cas, une baisse du nombre d’indemnités journalières remboursées par l’Assurance Maladie est escomptée.

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