Le Regard de la semaine est signé Patrice Roy.
Ces jours-ci, je retrouve avec une immense joie la jeune Chinoise que nous avions hébergée, trois ans durant, pour ses études au Lycée pilote innovant international du Futuroscope, il y a une douzaine d’années. Avec elle, j’ai appris à aimer la Chine et, un peu, la connaître. Néanmoins, aujourd’hui, la Chine m’inquiète. Elle m’inquiète plus que les Gilets jaunes ou les récentes émeutes, événements graves mais surmontables.
Depuis les années 80, nous déléguons à ce pays toutes nos fabrications, des plus simples aux plus sophistiquées. Nous avons perdu nos savoir-faire, basiques et stratégiques. Nous avons cru, j’ai cru, que l’augmentation de leur niveau de vie et l’ouverture sur le monde les entraîneraient vers la démocratie et leur intégration dans l’ordre occidental. Je me suis trompé, lourdement trompé. Le troc du parti au pouvoir, « gagnez de l’argent, mais ne touchez pas à la politique » fonctionne, de gré ou de force. Aucune de nos espérances ne s’est concrétisée.
Aujourd’hui, les dirigeants musellent la parole à un niveau inimaginable pour nous, Français, qui chouinons pour un rien. Chaque citoyen est fliqué nuit et jour sans échappatoire, les frontières sont bien gardées et le Covid a eu bon dos pour bien des décisions. Les Chinois sont impactés, c’est triste, mais sans grande influence sur nos vies. Non, je suis inquiet de leur expansionnisme déclaré et revendiqué. Traditionnellement, l’empire du Milieu vivait replié sur lui-même, aidé par sa taille gigantesque et sa population nombreuse. À certaines époques, vouloir naviguer trop loin pouvait vous coûter la vie. Depuis l’arrivée du dernier président, la ligne a changé. Ils se sont assis sur les accords concernant Hong Kong. Ils exercent une pression phénoménale sur Taïwan, qui n’a aucune envie de rejoindre le giron originel. Ils privatisent des îles aux Paracels et aux Spratleys dans le déni de l’ordre établi. Leur armée est la plus nombreuse et, surtout, leur marine est aujourd’hui la plus grosse. Les porte-avions ne servent pas à défendre les côtes, mais à se projeter au loin ! Bien implantés en Afrique, ils possèdent la capacité à s’engager militairement partout dans le monde.
La Chine navigue dangereusement entre l’agresseur russe et le monde occidental. Ce pays maîtrise la cyberguerre, espionne depuis longtemps les Etats, les entreprises et les gens. Et si nous cessions enfin d’être naïfs, d’être des Bisounours ? Et si nous regardions la réalité en face ? La Chine m’inquiète ! Pouvons-nous encore retrouver notre indépendance stratégique avec une Europe forte ? Ce qui se passe chez nous peut être grave, ce qui se passe loin de nos yeux peut être encore plus dangereux.
CV express
Après avoir bourlingué à travers le monde avec la marine, puis installé des stations de télécommunications pendant une dizaine d’années, je suis revenu dans ma région natale. J’y ai crée Géo.RM, mon entreprise de services informatiques en cartographie et GPS. Aujourd’hui retraité, je partage mon temps entre la marche, les voyages et l’écriture. Je suis l’auteur d’Atlantique trip, une chronique légère des années 70 avec vue sur mer. D’autres ouvrages sont en préparation.
J'aime : lire les nouvelles du jour, le pot-au-feu, bricoler, marcher sur les chemins de Compostelle.
J'aime pas : les intégristes de tous poils, les aigris, le riz au lait et le na- tionalisme.