Marcel et 
son armée de plomb

Hussards napoléoniens, tirailleurs sénégalais et autres guerriers huron cohabitent en parfaite harmonie chez Marcel Gasnier, à Châtellerault. Une collection tout de plomb et d’étain qui dure depuis plus de trente ans.

Pierre Bujeau

Le7.info

« Je ne fume pas, je ne bois pas mais je collectionne ! » 
De tous les vices, Marcel en a « adopté » un inoffensif pour son corps, moins pour son porte-monnaie. Au premier étage de sa maison châtelleraudaise, dans une pièce de 
20m² à peine, les vitrines ploient sous le poids de milliers de figurines minutieusement rangées. Marcel jette un œil dans le couloir, baisse la voix et confie : « Une boîte de cinquante soldats en plomb vaut environ 100€. Si ma femme entendait ça, elle me tuerait… » 
parler d’argent ? Inutile d’y songer, surtout lorsqu’il s’agit de traverser la France, d’une salle des ventes à l’autre, en quête de la perle rare. A l’origine de cette passion, née il y a une trentaine d’années, il y a une rencontre. Celle-ci a changé sa vie. « Je les collectionnais un peu sans y prêter vraiment attention, jusqu’au jour où Jacques Tomine, mon voisin, historien de profession, m’a transmis le virus. Il avait une petite collection de soldats. Ça a été un déclic. » Depuis le Breton consacre une partie de son temps libre de retraité à cette passion dévorante. Derrière les vitrines s’alignent des milliers de soldats de plomb -il ne les compte plus-, classés avec soin, presque avec tendresse. Parmi ses pièces les plus précieuses : 
des soldats allemands, lui rappelant ses treize années de carrière militaire passées outre-Rhin. « Ces figurines ont été fabriquées à Nuremberg par la maison Heinrichsen, en 1890. Une entreprise aujourd’hui disparue. »


Collection en voie 
de disparition

Au siècle dernier, les fabricants de soldats de plomb pullulaient. Aujourd’hui, il n’en reste qu’un seul en France. Entre la hausse du prix de la matière première et la précision de sa fabrication, ces figurines sont devenues des objets rares. Et les pièces anciennes, souvent mal conservées, se raréfient. « On les jetait sans y penser. A l’époque, ça ne coûtait pas grand- chose… » 
Conscient de la rareté de son trésor, Marcel n’expose que rarement sa collection. Ses batailles, il les mène en solitaire, dans le calme de son musée personnel, porté par les riffs électriques de Led Zeppelin en fond. « J’ai tenté de transmettre cette passion à mes enfants, à mes petits-enfants, mais rien n’y fait. Je me demande ce qu’il adviendra de tout ça. J’espère seulement qu’elle ne tombera pas entre des mains mal avisées, intéressées uniquement par la valeur marchande. » Une inquiétude légitime, alors qu’un chevalier portant les couleurs de Louis Ier de Bourbon a été récemment adjugé à 1 400€. Mais pour Marcel, la vraie richesse est ailleurs. Dans l’histoire, les détails, et l’âme de ces soldats figés pour l’éternité.

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