Aller au bout

Coach et fondatrice de Humanne, cabinet spécialisé dans l’équilibre carrière et santé des managers et des dirigeants, Sophie Micheau nous livre ses réflexions autour de la santé et du travail.

Arnault Varanne

Le7.info

« Je me sens au bout du rouleau », « Je suis dans la vague et j’ai arrêté de lutter », « S’il m’arrivait quelque chose de grave, je pourrais enfin dire stop »... Parfois, le travail bouscule nos vies au point de menacer notre santé physique et mentale. Et il arrive que nous décidions de ne rien changer, voire « d’aller au bout » avec une forme d’obstination et de persévérance. Comme si nous devions achever quelque chose en poussant la logique à son terme. D’ailleurs, ne dit-on pas qu’il faut « toucher le fond pour mieux remonter » ?

Dans le cadre de mes accompagnements articulant carrière et santé, je constate trop souvent les dégâts produits par l’idée selon laquelle « toucher le fond » provoquerait les conditions idéales pour ré-agir. Non : « toucher le fond » n’aide pas à rebondir. On a tendance à idéaliser le fait que cela permettra enfin de s’autoriser à entendre les signaux d’alerte, à considérer ses besoins et à prendre de nouvelles décisions. Comme s’il fallait subir sciemment « jusqu’au bout » pour oser agir et vivre différemment.

Et c’est bien là le sujet : en quoi avoir atteint le pire nous rendrait-il plus légitimes à prendre soin de notre carrière et de notre santé ? L’approche est hautement risquée car « remonter la pente » après une maladie, un burn-out ou un accident de la vie se révèle souvent aussi long que complexe. D’ailleurs, que signifie « aller au bout » ? Evidemment, nous avons tous nos propres seuils. Et si nous osions interroger cette intention jusqu’au-boutiste et sacrificielle lorsqu’elle se présente ? Et si nous refusions de devoir vivre le pire pour nous autoriser à vivre le meilleur professionnellement… et personnellement ?

smicheau@humanne.fr, humanne.fr.

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