Frère Truck, 
le goût de la solidarité

Homme de parole, le père Matthieu Le Merrer sait aussi se retrousser les manches. Une fois la messe dominicale célébrée, le prêtre troque l’aube contre un tablier avant de grimper au volant de son food truck solidaire pour servir des crêpes aux familles les plus précaires.

Pierre Bujeau

Le7.info

Ce week-end, pas de mariage ni de sacrement : le père Le Merrer… fait des crêpes. Quadragénaire dynamique, il sillonne Poitiers à bord d’un camion reconnaissable entre mille. La couleur d’abord, un orange tirant sur le fuchsia. Puis le slogan : « La crêpe pour tous ». 
Les aficionados de Disney y verront un clin d’œil à « Frère Tuck », le moine complice de Robin des Bois. Et à l’instar de l’archer au grand cœur, le prêtre entend lui aussi « redonner aux pauvres ». « Comme beaucoup, je constate l’augmentation de la pauvreté dans ma paroisse, confie-t-il. Je prêche, je parle beaucoup, mais il me semblait nécessaire d’être aussi dans l’action. » Alors en 2023, il crée une association, rallie une dizaine de bénévoles à sa cause et se lance dans une croisade contre l’isolement et la précarité auprès des plus démunis. Vendues à prix symboliques- 0,50€ nature, 1€ garnie- les crêpes deviennent surtout le support d’un dispositif solidaire inspiré du café suspendu. Le principe est simple : des clients paient d’avance une ou plusieurs spécialités si chères à ses racines bretonnes, destinées ensuite à celles et ceux qui n’ont pas les moyens de se les offrir. Sa crêpière ambulante fait désormais escale aux Trois-Cités et à Buxerolles, le mercredi et le dimanche après la messe, cela va de soi. L’ancien capitaine de l’équipe de football de l’Espérance sportive de Saint-Benoît pousse même la générosité encore plus loin.

Frère Truck à domicile

« Certaines personnes sont isolées, d’autres trop âgées pour se déplacer. Alors on va vers elles », 
explique-t-il. Ce week-end, des scouts de Poitiers- rejoints par d’autres d’Angers sont venus prêter main forte malgré le froid, transformant la tournée du food truck en véritable mission fraternelle. Stanislas, étudiant, sourit : « Livrer des crêpes ? Une première ! On aurait pu passer le week-end entre amis, mais on fait ça de bon cœur. C’est concret, humain. » Antoine, prêt à enfourcher son vélo direction Saint-Benoît, y voit aussi « une belle activité de cohésion » entre groupes scouts. Aumônier de plusieurs d’entre eux, le père Le Merrer se dit touché par ce qu’il observe sur le terrain : 
« Ma certitude intérieure est que l’humain est généreux, mais il faut lui donner les possibilités de l’exprimer. On voit qu’avec nos actions, on déclenche de la générosité, y compris chez les plus pauvres eux-mêmes. »

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