Embellie contrariée pour le jardin

Les entreprises du paysage n'échappent pas à la crise. Si les fortunes sont diverses d'une société à l'autre, le secteur devrait connaître un coup de frein certain cette année. Alors même que tous les indicateurs semblaient au vert...

Steve Henot

Le7.info

A la sortie de l'hiver, les appels auraient dû pleuvoir et l'agenda, se remplir très vite. Mais cette année, il n'en a rien été pour A Brunet Paysage. Au lendemain du 16 mars, l'entreprise poitevine a été à l'arrêt durant trois semaines, et sa vingtaine de salariés au chômage partiel. Le confinement passé, la reprise d'activité reste timide. « On se contente d'honorer les travaux qui nous avaient été commandés avant le confinement », confie le gérant, Stéphane Cothet.

La crise tombe mal, alors que de nombreux paysagistes de la Vienne comptaient surfer sur « une petite embellie ». En effet, sur la période 2017-2018, le secteur a enregistré une augmentation de +15 % de son chiffre d'affaires, à 5,9 milliards d'euros. Un record, soulignait l'Union nationale des entreprises du paysage (Unep), en novembre dernier. « Le gros de la saison démarre toujours à partir du mois de mars. On sortait de six mois difficiles, avec beaucoup de pluie. Tout le monde devait avoir beaucoup de travail sur la période », explique Philippe Loosfeld, dirigeant de Loosfeld Paysages, installé à Sèvres-Anxaumont.

Les entreprises du secteur ont été diversement touchées par la crise. Difficulté d'approvisionnement en matériaux, refus de clients, inquiétudes des salariés... « Les sociétés spécialisées dans les marchés publics sont celles qui connaissent le plus de difficulté », note Philippe Loosfeld, qui est aussi le président départementale de l'Unep. Sollicité par ses pairs dans cette période, le dirigeant les a « encouragés à reprendre dès que possible, car nous n'avions que peu d'assurance pour pouvoir bénéficier des mesures de chômage partiel ». Plusieurs sociétés ont ainsi vu leurs demandes rejetées par la Dirrecte.

Des investissements à la baisse

Naturellement, le redémarrage de l'activité s'est accompagné d'une réorganisation du travail. Les salariés se déplacent désormais chacun dans un véhicule, la distanciation et les gestes barrières sont de rigueur avec la clientèle... Sans incidence toutefois sur les délais de livraison. Cette reprise n'en reste pas moins timide, laissant planer un grand flou sur le reste de l'année. « Il y aura sûrement une baisse du chiffre d'affaires, mais ce sera marginal par rapport à d'autres secteurs, prévoit Philippe Loosfled. On est dans une période d'observation, d'attente. Mais on se prépare déjà à revoir nos perspectives de développement à la baisse. »

En 2018, près de 7 000 emplois ont été créés et plus de 4 700 salariés ont rejoint le secteur entre 2016 et 2018. Mais les entreprises du paysage les plus en difficulté pourraient être tentées de revoir leur niveau d'investissement, notamment en formation, dès cette année. Tout dépendra du maintien de la demande, Philippe Loosfeld veut rester optimiste. « Avec le confinement, il y a eu un regain d'attrait des gens pour le jardin, cela a fait naître des envies. Et c'est un secteur qui a été boosté ces dernières années par le marché de la piscine. Comme en 2008, l'avenir dépendra essentiellement de la confiance des ménages, plus que du pouvoir d'achat. »

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